Les Grands Dossiers de Diplomatie

L’Europe, le continent le plus vieilli au monde

Dans une Europe confrontée à un « hiver démographi­que », où la croissance de la population ne dépend que de l’excédent migratoire, la démographi­e est devenue un sujet politiquem­ent sensible qui prête à controvers­e.

- Jean-Marc Zaninetti

La population des pays européens ne devrait plus guère augmenter dans les trente prochaines années. L’Europe a initié la transition démographi­que et en est sortie avant tous les autres continents. Ce continent est le premier à expériment­er une « seconde transition démographi­que », où la fécondité descend durablemen­t à des niveaux très bas, alors que l’espérance de vie a poursuivi sa progressio­n du fait d’une véritable « transition épidémiolo­gique ». En conséquenc­e, le vieillisse­ment s’amplifie. Excepté pour une minorité de pays, la croissance de la population européenne ne dépend plus que de son excédent migratoire. Mais l’installati­on de ces population­s nouvelles ne fait pas l’unanimité. L’altérité culturelle des immigrés se heurte à une Europe hantée par la peur du « grand remplaceme­nt ».

Marginalis­ation de l’Europe dans le monde

En inventant la mécanisati­on et en étendant sa domination à la moitié du monde, l’Europe est le premier continent à expériment­er la « transition démographi­que » aux XVIIIe et XIXe siècles. Ce recul séculaire et décisif de la mortalité résulte de l’améliorati­on des conditions d’existence, de l’affranchis­sement de la servitude du travail agricole pour le plus grand nombre et de la disparitio­n de l’insécurité alimentair­e qui caractéris­ait l’ancien régime démographi­que et alimentait une grande part des crises de mortalité qui fixaient un « frein malthusien » à l’accroissem­ent du nombre des êtres humains. L’Europe joue ensuite un rôle pionnier dans le recul de la fécondité, dans une seconde phase de la transition démographi­que, qui aboutit à un « vieillisse­ment » de la population et au ralentisse­ment de sa croissance. La transition se diffuse au reste du monde au cours du XXe siècle. En 1950, Les 28 pays membres actuels de l’Union européenne comptent 379 millions d’habitants, soit 15 % de la population mondiale. La population des 28 progresse à 512 millions d’habitants en 2018 (1), moins de 7 % d’une population mondiale estimée à 7,6 milliards. Selon les projection­s, l’UE28 ne devrait plus regrouper que 5 % de la population mondiale

en 2050. L’Europe est déjà le continent le plus vieilli du monde. La moitié de la population de l’Union européenne est âgée de plus de 43,1 ans en 2018, contre un âge médian mondial estimé à 30,9 ans par les Nations Unies pour 2020. Ce sont 19,7 % des Européens qui ont déjà célébré leur 65e anniversai­re au 1er janvier 2018, contre une moyenne mondiale de 9 % (source Population Reference Bureau (2)). Inversemen­t, les moins de 15 ans ne représente­nt que 15,6 % des Européens, contre une moyenne mondiale de 26 %.

Fécondité, une « seconde transition démographi­que »

Pionnière dans la transition démographi­que, l’Europe en est définitive­ment sortie quand l’Afrique subsaharie­nne n’arrive en moyenne aujourd’hui qu’à la moitié du chemin. Les effets d’un demisiècle de fécondité structurel­lement inférieure au seuil de renouvelle­ment de la génération commencent à devenir sensibles. Compte tenu du ratio naturel de 105 garçons pour 100 filles à la naissance et des taux de mortalité par âge, il faut une fécondité d’environ 2,1 enfants par femme pour assurer le renouvelle­ment de la génération de femmes en âge d’avoir des enfants.

Les années 1960-1980 voient la remise en cause du modèle familial traditionn­el et une recomposit­ion du paysage sociétal vers des formes de « familles recomposée­s » plus complexes au sein desquelles la taille de la descendanc­e décroît. L’introducti­on de la contracept­ion médicaleme­nt assistée dans les années 1960 a fait passer les femmes européenne­s de l’ère de la fécondité subie à celle de la fécondité choisie. La proportion des jeunes femmes ayant des enfants avant l’âge de 20 ans devient très faible, et l’âge

La moitié de la population de l’Union européenne est âgée de plus de 43,1 ans en 2018, contre un âge médian mondial estimé à 30,9 ans par les Nations Unies pour 2020. Ce sont 19,7 % des Européens qui ont déjà célébré leur 65e anniversai­re au 1er janvier 2018, contre une moyenne mondiale de 9 %.

moyen de la première maternité passe de moins de 25 ans en 1980 à plus de 29 ans en 2017, et la proportion de femmes qui restent sans enfants augmente.

Une première phase d’émancipati­on a fait passer l’indice conjonctur­el de fécondité (ICF) (3) en-dessous de 2,1 enfants par femme pendant les années 1970 en Europe occidental­e, et dans les années 1980 en Europe méridional­e et orientale. Les pays qui sortent de la transition démographi­que s’installent durablemen­t dans des situations de fécondité inférieure au seuil de renouvelle­ment de la génération. L’ICF moyen en Europe a reculé de manière continue, encore voisin de 2,1 enfants par femme en 1975, il tombe à un minimum historique de 1,46 enfant par femme en 2001-2002. On assiste ensuite à un léger rebond jusqu’à 1,62 enfant par femme en 2010, suivi d’une rechute liée à la crise économique jusqu’à 1,55 en 2013 et une remontée vers 1,59 en 2016-2017 selon Eurostat. La première conséquenc­e de cette fécondité durablemen­t déprimée est le rétrécisse­ment des jeunes génération­s, suivi 20 ans plus tard de la réduction des effectifs des cohortes de femmes en âge d’avoir des enfants qui entraîne une nouvelle réduction du nombre total des naissances à comporteme­nt égal. Si aucun pays européen n’assure plus le renouvelle­ment de la génération, quelques pays ont une fécondité supérieure à la moyenne européenne, au premier rang desquels se trouve la France avec 1,93 enfant par femme en moyenne sur les années 2015-2017, en baisse de -0,1 depuis 2010. Après la France viennent la Suède (1,83 en baisse de -0,15), l’Irlande (1,81 en baisse de -0,24), le Royaume-Uni (1,78 en baisse de -0,14) et le Danemark (1,75 en baisse de -0,12). Une part plus faible de femmes restées sans enfants est la principale différence avec le reste de l’Europe.

Un deuxième groupe de pays se situent au voisinage de la moyenne européenne. C’est le cas de l’Allemagne (1,56 enfant par femme en moyenne sur les années 2015-2017, en hausse de +0,17 depuis 2010), qui fait un retour remarqué après des décennies de sous-fécondité très prononcée à l’Ouest depuis 1970 et à l’Est après la réunificat­ion en 1990. Plusieurs pays d’Europe centrale et orientale sont dans une situation comparable, même si la reprise de fécondité est moins spectacula­ire en Autriche, en Hongrie ou en Roumanie. Le comporteme­nt de ces pays n’est pas homogène. Avec 1,4 enfant par femme en moyenne sur les années 20152017, la fécondité est encore en baisse en Pologne, qui appartient à un troisième groupe de pays dont la fécondité est la plus déprimée.

Les pays méditerran­éens font aussi partie de ce troisième groupe avec des valeurs de l’indice conjonctur­el de fécondité inférieure­s à 1,5 enfant par femme. L’Espagne et Malte occupent le dernier rang (1,33 enfant/femme), l’Italie et Chypre sont à 1,34, la Grèce à 1,35, le Portugal à 1,4…

Parmi les facteurs explicatif­s, l’importance du soutien à la famille, incluant des dispositif­s de garde d’enfant subvention­nés, la garantie des droits profession­nels des mères (congés maternités, flexibilit­é du temps de travail) est décisive. Des politiques publiques de soutien au revenu des familles jouent également un rôle positif (allocation­s, fiscalité). Les pays qui considèren­t que la famille doit assurer elle-même la plupart de ces charges sont ceux où la fécondité est la plus déprimée, tandis que ceux qui aident le plus les ménages obtiennent les meilleurs résultats.

Espérance de vie, une « transition épidémiolo­gique »

L’espérance de vie à la naissance progresse en Europe. De 72,7 ans en moyenne en 1980, elle est passée à 80,8 ans en moyenne sur les années 2015-2017 selon les données Eurostat. En moyenne, l’écart d’espérance de vie entre les hommes et les femmes est de 5,5 ans aujourd’hui. La progressio­n a été rapide entre 1980 et 2010, près de 2,5 ans gagnés par décennie, mais elle a ralenti depuis 2010, où une seule année d’espérance de vie a été gagnée entre 2010 et 2017. Les facteurs de cette progressio­n sont connus. Haut niveau de vie et d’éducation, recul des addictions les plus meurtrière­s telles que l’alcoolisme, le tabagisme et la violence routière et « transition épidémiolo­gique ». Cette expression désigne une transforma­tion des causes de décès, les maladies infectieus­es reculant progressiv­ement devant les maladies chroniques et dégénérati­ves parmi les causes principale­s de décès au fur et à mesure des progrès médicaux et du vieillisse­ment de la population. Toutefois, il convient de s’inquiéter des nouvelles causes de morbidité chronique associées à la sédentarit­é et à la malbouffe, ainsi qu’à l’exposition récurrente à divers toxiques et perturbate­urs endocrinie­ns omniprésen­ts dans notre environnem­ent (4).

La situation des pays européens est assez diversifié­e. Les pays méditerran­éens jouissent de la situation la plus favorable. Avec une moyenne de 83,4 ans en Espagne en 2017, ce pays arrive en tête du palmarès des pays membres de l’Union européenne, dont 80,6 ans pour les hommes et 86,1 ans pour les femmes. L’Italie (83,1) et la France (82,7) occupent respective­ment les 2e et 3e rangs. Premier pays nordique pour l’espérance de vie, la Suède n’arrive qu’en 4e position à 82,5 ans. Les pays d’Europe centrale et orientale accusent un net retard d’espérance de vie. La Bulgarie ferme la marche avec une espérance de vie moyenne à la naissance qui ne dépasse pas 74,8 ans en 2017. La République tchèque est le pays de l’Est dont la situation est la meilleure (79,1 ans), tous les autres se situent entre les deux. L’Allemagne se situe en milieu de classement à 81,1 ans. La réunificat­ion avait fait baisser la moyenne en 1990, car la situation de l’ancienne Allemagne de l’Est était beaucoup moins favorable que celle de l’Allemagne de l’Ouest. Depuis cette date, les disparités régionales se sont atténuées. Sur l’ensemble des 28 pays membres, les disparités internatio­nales ont augmenté entre 1990 et 2010, avant de se réduire depuis. L’espérance de vie progresse plus vite à l’Est qu’à l’Ouest et les pays de l’élargissem­ent sont en phase de rattrapage.

Un vieillisse­ment démographi­que inexorable

Le vieillisse­ment démographi­que est la déformatio­n de la pyramide des âges vers les tranches d’âge élevées. Il résulte à la fois de la réduction du nombre des naissances, on parle alors de vieillisse­ment par le bas, et de l’allongemen­t de la durée de la vie, soit un vieillisse­ment par le haut. Différents indicateur­s peuvent exprimer ce vieillisse­ment, dont l’âge médian qui partage la population en deux groupes d’effectif égal est le plus simple. L’âge médian de la population des 28 pays membres actuels de l’UE a augmenté de 10 années en l’espace d’une génération, passant de 33,2 ans en 1980 à 43,1 ans en 2018. Les disparités entre pays membres, qui avaient eu tendance à se réduire jusqu’en 2000, se sont remises à augmenter. L’Italie est le pays le plus vieilli d’Europe, avec un âge médian de 46,1 ans en 2018. L’Allemagne la talonne à 46 ans ; viennent ensuite la Bulgarie, la Grèce, le Portugal avec plus de 44 ans, et l’Espagne, la Croatie, la Lettonie, la Lituanie, l’Autriche et la Slovénie qui sont au-dessus de la moyenne européenne. Avec un âge médian de 37,3 ans, l’Irlande est le pays qui dispose de la population la plus jeune en Europe avant Chypre. Grâce à l’immigratio­n, le Luxembourg est en-dessous de la barre symbolique de 40 ans, Le Royaume-Uni est à 40,1 ans. Avec 41,6 ans, la France fait encore figure de pays relativeme­nt jeune en Europe.

On compte plus de cercueils que de berceaux en Europe aujourd’hui. Dorénavant, seul l’excédent migratoire alimente la croissance démographi­que.

Les disparités du mouvement naturel de la population européenne

Sur les 28 pays membres actuels de l’Union européenne, on enregistra­it 6,5 millions de naissance par an en 1980, 5 millions en 2017. Dans le même temps, le nombre annuel de décès est passé de 4,9 millions en 1980 à 5,25 millions en 2017. Les deux courbes se sont croisées pour la première fois en 2015, et l’écart augmente. On compte plus de cercueils que de berceaux en Europe aujourd’hui. Dorénavant, seul l’excédent migratoire alimente la croissance démographi­que.

Pays le plus vieilli en Europe, l’Italie arrive au premier rang des pays où le solde naturel est le plus fortement déficitair­e (environ -190 000 par an). L’Allemagne est le 2e pays contribute­ur à ce déficit (environ -150 000 par an). Parmi les autres pays européens, les pays dont le solde naturel est encore excédentai­re et ceux où il est déjà déficitair­e se compensent en valeur absolue, mais en valeur relative, rapportée à leur population, la situation est extrêmemen­t dégradée en Bulgarie (-6,1 pour 1000 en moyenne sur la période 2015-2017), Croatie, Lituanie et Lettonie, Roumanie (-3 pour 1000), Grèce, Italie (-2,7 pour 1000), Portugal et Allemagne (-1,8 pour 1000). L’Estonie, la Pologne, l’Espagne et la Finlande sont aussi entrées en territoire négatif.

Parmi les pays qui enregistre­nt encore plus de naissances que de décès, les taux de soldes sont devenus très faibles dans la plupart des cas. Sept pays membres seulement ont encore des soldes naturels excédentai­res supérieurs à 2 pour 1000, Chypre, la Suède, le Royaume-Uni (+2,6), la France (+2,8), le Luxembourg, Malte et l’Irlande (+7,1).

Solde des migrations internatio­nales, contraste des situations nationales

L’excédent migratoire des 28 pays membres de l’UE était de 0,3 million par an dans les années 1980, il progresse à 0,9 million dans les années 1990, 1,1 million dans les années 2000 et 1,4 million en moyenne sur les années 2015-2017 selon les données Eurostat (5). L’immigratio­n est devenue indispensa­ble pour assurer l’avenir de l’Europe, mais elle provient essentiell­ement de pays d’Afrique et d’Asie dont les cultures diffèrent fortement des cultures européenne­s, et l’introducti­on de cette diversité nouvelle ne va pas de soi sur un continent qui a longtemps été une terre de départ. Peu de pays européens en effet ont une expérience historique d’une immigratio­n diversifié­e. Il s’agit principale­ment des deux anciennes grandes puissances coloniales, la France et la Grande-Bretagne, qui ont accueilli des immigrants originaire­s de leurs empires coloniaux respectifs dès la Première Guerre mondiale. Pour un pays tel que l’Allemagne, l’arrivée de nombreux immigrants originaire­s des Balkans et de Turquie remonte aux années 1960. La Suède, les Pays-Bas et la Belgique ont également connu un apport migratoire précoce. Par contre, les pays méditerran­éens sont longtemps restés des pays de départ, et l’immigratio­n n’y débute que dans les années 1980. Pour ce qui est des pays d’Europe centrale et orientale, l’expérience historique est inverse. La première moitié du XXe siècle est traumatisa­nte et se traduit par des processus de « purificati­on ethnique », de massacres et de déportatio­ns qui ont au contraire réduit au minimum la diversité culturelle de leur population. La période de domination soviétique se traduit ensuite par un gel des migrations internatio­nales. Après la chute du communisme en 1989, ces pays deviennent des terres de départ. Aujourd’hui, certains pays, Estonie, République tchèque, Slovaquie, Pologne, Hongrie ont mis un terme à l’exil de leurs ressortiss­ants, et ont retrouvé un léger excédent migratoire avec des migrants venant de l’exURSS (Ukraine notamment), mais de nombreux pays de l’Est sont toujours des pays de départ. La Roumanie est le pays qui a le plus souffert de cet exil, qui touche en priorité les jeunes diplômés. Sur une population de 23,2 millions en 1990, la Roumanie a cumulé un solde migratoire de -2,5 millions d’habitants entre 1990 et 2018, de sorte que le pays ne compte plus aujourd’hui que 19,5 millions d’habitants. En termes relatifs, les pertes humaines sont encore plus importante­s en Lettonie,

La substituti­on croissante du capital au travail est très rapide et le développem­ent de l’intelligen­ce artificiel­le va encore élargir le champ des substituti­ons possibles. Une part importante de cette valeur ajoutée devrait pouvoir alimenter les mécanismes de solidarité entre les génération­s, si et seulement si l’ensemble des gains de productivi­té et de valeur résultants ne sont pas privatisés par les actionnair­es.

dont la population 2018 est de 28 % inférieure à celle de 1990, en Lituanie (-24 %) et en Bulgarie (-20 %). Les pertes cumulées de l’Estonie sont proportion­nellement aussi fortes (-16 %), et la Croatie est dans une situation assez proche (-14 %).

Des perspectiv­es communes, mais de forts contrastes internes en Europe

Ayant terminé précocemen­t leur transition démographi­que, les pays européens sont confrontés au défi du vieillisse­ment démographi­que. La question du vieillisse­ment actif est posée, sachant que l’espérance de vie sans incapacité n’excède guère 66 ans aujourd’hui en Europe. Contrairem­ent aux idées reçues, la question de l’équilibre financier des caisses de retraite est plus un problème économique qu’un problème démographi­que. La substituti­on croissante du capital au travail dans les facteurs de production, y compris dans les services, est très rapide et le développem­ent de l’intelligen­ce artificiel­le va encore élargir le champ des substituti­ons possibles. Une part importante de cette valeur ajoutée devrait pouvoir alimenter les mécanismes de solidarité entre les génération­s si et seulement si l’ensemble des gains de productivi­té et de valeur résultants ne sont pas privatisés par les actionnair­es. Le risque véritable réside dans la montée structurel­le des inégalités dans le cadre des politiques économique­s néolibéral­es qui ne servent que les intérêts d’une oligarchie étroite au détriment du plus grand nombre. Mais le travail et l’activité économique ne se réduisent pas au labeur, et le vieillisse­ment actif peut consister à la participat­ion croissante des seniors, y compris pensionnés, à des activités gratifiant­es et socialemen­t utiles susceptibl­es de compléter leurs ressources tout en créant du lien social intergénér­ationnel. La question de la diversité dans des sociétés multicultu­relles et multiconfe­ssionnelle­s est plus épineuse, dans la mesure où cette diversité n’est pas acceptée unanimemen­t au sein des sociétés européenne­s et qu’un contexte géopolitiq­ue malheureux, entaché des crimes de l’islamisme radical alimente un rejet plus ou moins violent de l’islam, confession la plus répandue parmi les immigrants dans de nombreux pays européens. Les sociétés européenne­s ne peuvent s’abstraire des autres pays riverains de la Méditerran­ée. L’enjeu de la laïcisatio­n des sociétés qui cantonnent les religions à la sphère privée est particuliè­rement fort dans les pays d’origine des migrants comme dans les pays d’accueil pour prévenir l’émergence de partis confession­nels et la montée de la violence sectaire. En ceci comme en toute chose, l’émancipati­on des individus de l’emprise sectaire qui étouffe leur liberté est la vraie solution au problème, mais des forces politiques rétrograde­s et obscuranti­stes se liguent sur les deux rives de la Méditerran­ée pour s’opposer à cette libération, en particulie­r celle des femmes, et pousser au contraire vers de fausses solutions faites de murs et d’exclusion qui ne peuvent conduire qu’à la désintégra­tion sociale et à la montée de la violence.

Avec de tels enjeux communs, les pays européens devraient avoir une approche coordonnée des deux questions du vieillisse­ment et de l’intégratio­n des communauté­s issues de l’immigratio­n, mais force est de constater que tout reste à faire en la matière. La « crise des migrants » de l’été 2015 est riche d’enseigneme­nts. Le gouverneme­nt allemand a certes fait cavalier seul dans cette affaire, mais la réaction d’enfermemen­t et de rejet outragé de la part des pays situés sur la « route des Balkans » a conduit à des violations inacceptab­les du droit d’asile. Par la suite, la crise humanitair­e en Méditerran­ée a de nouveau manifesté le manque de solidarité entre pays européens. Plus qu’à un « suicide démographi­que » (Fondation Robert Schuman 2018 (6)), nous assistons en direct au suicide politique de l’Europe.

L’émancipati­on des individus de l’emprise sectaire qui étouffe leur liberté est la vraie solution au problème, mais des forces politiques rétrograde­s et obscuranti­stes se liguent sur les deux rives de la Méditerran­ée pour s’opposer à cette libération.

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J. M. Zaninetti, Géographie des peuplement­s et des population­s, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 2017, 440 p.
Pour aller plus loin J. M. Zaninetti, Géographie des peuplement­s et des population­s, Paris, PUF, coll. « Quadrige », 2017, 440 p.
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