Les Grands Dossiers de Diplomatie
Naples : le trafic de déchets, un business mafieux.
Alors que la région autour du Vésuve est l’une des régions les plus fertiles d’Italie, le trafic de déchets organisé par la Camorra napolitaine en a également fait l’une dont les sols sont les plus pollués. Le phénomène n’est pas nouveau puisque les alertes sont récurrentes depuis 1994, et qu’au mois de décembre 2007, la crise semblait atteindre son paroxysme avec plus de 100 000 tonnes de déchets dans les rues, les éboueurs n’ayant plus d’endroit pour les accueillir. À l’époque, Massimiliano Marotta, avocat spécialisé dans le contentieux sur les déchets, déclarait que « la Camorra a compris que les déchets pouvaient rapporter une fortune » en infiltrant les multiples sociétés de ramassage et les centres de retraitement — payés par les communes — pour prendre en charge des déchets qui n’étaient jamais réellement traités. Depuis, les décharges sauvages se sont multipliées et le problème n’est toujours pas réglé. En 2015, grâce aux aveux d’un repenti, la police italienne découvrait une immense décharge illégale dans un petit village de Campanie, où était enfouis dans le sol des déchets hospitaliers, de l’amiante et des résidus toxiques tels que des containers en provenance d’Allemagne remplis de plomb qui ont pollué les nappes phréatiques. En effet, depuis les années 1980, la Camorra fait venir en Campanie de toute l’Europe des déchets appartenant à des industriels malhonnêtes qui cherchent à s’en débarrasser à moindre frais. En 20 ans, près de 10 millions de tonnes de déchets toxiques auraient été enfouis illégalement dans la région avec un impact irréversible sur la santé de la population locale. Cette « Terre de feux », en référence aux nombreux incendies qui ont détruit en toute illégalité les montagnes de déchets pendant des années, est considérée par le journal italien La Stampa comme l’un des plus grands désastres environnementaux de l’histoire de l’Italie. Selon le rapport « Ecomafia 2018 », dressé par l’association Legambiente, le chiffre d’affaires total du trafic de déchets pour l’ensemble de l’Italie s’élèverait à plus de 14 milliards d’euros par an.