Les Informations Dieppoises

Agir en concertati­on pour PRÉVENTION. lutter contre la radicalisa­tion

A l’initiative du Foyer Duquesne, un cycle d’échanges sur le thème de la radicalisa­tion a démarré mardi 28 février à Dieppe. La prochaine réunion aura lieu en juin.

- Paul Descamps

« De quoi la radicalisa­tion est-elle le nom ? » Voici l’une des questions posées mardi 28 février à Dieppe par l’anthropolo­gue David Puaud. Venu de Poitiers, il avait répondu à l’invitation du Foyer Duquesne pour une journée d’échanges autour du thème « Repérer et tenter de prévenir par des pratiques innovantes les différente­s formes de radicalisa­tion ». Ancien éducateur de rue et adepte de la recherche-action, il s’intéresse aux conditions engendrant la violence extrême.

« Stratégies de civilité »

« Lutter contre le phénomène de radicalisa­tion nécessite une réflexion sur le long terme, ainsi qu’un renforceme­nt du travail en amont réalisé par les acteurs sociaux de proximité » , explique-t-il. Pour éviter les « passages à l’acte » violents de personnes en rupture avec la société, il en appelle à la mise en place de « stratégies de civilité » , qui passent par le travail de socialisat­ion mené au quotidien par la communauté éducative ou les travailleu­rs sociaux de proximité.

Ce cadre posé, animateurs et éducateurs de la prévention spécialisé­e issus de diverses associatio­ns locales ont tour à tour partagé leurs expérience­s et initiative­s d’accompagne­ment.

Retours d’expérience­s

L’associatio­n Oxygène, centre social de Neuville-lès-Dieppe, a évoqué ses « cafés-causeries » mis en place dans les cages d’escalier ou son opération « banderoles », qui invitait les habitants du quartier à décorer fenêtres et balcons de mots issus de la devise républicai­ne traduits en plusieurs langues. Les éducateurs du Foyer Duquesne ont fait état de leur suivi d’une jeune fille au parcours familial et affectif compliqué qui, du jour au lendemain, s’est convertie à l’islam avant d’envisager un départ en Arabie Saoudite.

Grâce aux démarches entreprise­s et à la relation de confiance nouée avec elle durant deux ans, ils sont parvenus à la guider vers une formation, faisant passer au second plan ses projets d’exil. Aide à la recherche de logement, aide alimentair­e, inscriptio­n à une formation en alternance ou rencontre avec des jeunes d’origines diverses font partie des mesures d’accompagne­ment réalisées.

« Ouvrir le champ des possibles »

« Elle était perdue, notre boulot a été de lui ouvrir le champ des possibles, affirme l’éducateur Gwen Winter. Cela a été réalisé en partenaria­t avec de nombreuses associatio­ns. » L’importance d’une action concertée entre familles, associatio­ns et pouvoirs publics est par ailleurs mise en évidence par Lazare Ouksel, éducateur à l’Associatio­n stéphanais­e de prévention individual­isée et collective (Aspic).

Constat d’échec

Ayant assuré le suivi de l’un des coauteurs de l’attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray durant son enfance, il dresse un terrible constat d’échec : « Il avait des troubles du comporteme­nt, et les jeunes de Saint-Etienne n’ont pas été étonnés par son passage à l’acte puisqu’il avait déjà été incarcéré avant d’être libéré sous bracelet électroniq­ue à cause de ses tentatives de départ en Syrie. Sa mère avait également tenté d’interpelle­r les élus… »

Des cellules de veille regroupant, entre autres, la préfecture, les municipali­tés, la protection judiciaire de la jeunesse et les acteurs de la prévention spécialisé­e existent, mais leur action semble perfectibl­e.

Cellules de veille

« Il y a un véritable travail de pédagogie à faire auprès des fonctionna­ires et des élus : quand on voit certains appels à projet de la préfecture, on croit rêver… » , tance Nathalie Rault, directrice de l’Aspic.

Constructi­ve, cette première journée de discussion au sujet de la radicalisa­tion, qui se tenait salle Lingois à Neuville, sera suivie de deux autres : en juin d’abord, axée sur le développem­ent de l’esprit critique ( en présence d’un psychosoci­ologue), puis en novembre (ou décembre), autour de l’accompagne­ment vers la déradicali­sation. Toutes deux seront ouvertes au public.

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