Les Informations Dieppoises

De jeunes réfugiés futurs boulangers

Plusieurs jeunes mineurs d’origine étrangère ont posé leurs valises à Dieppe. Particuliè­rement motivés pour se former et s’insérer dans notre ville, ils sont entrés en apprentiss­age en boulangeri­e, en pâtisserie… et suivent des cours au CFA de Rouxmesnil.

- V. W.

Ils s’appellent Sikou et Mohammed. Ils viennent du Mali et de Guinée. Leur point commun ? Ces mineurs sont arrivés seuls à Dieppe, sans famille, par leurs propres moyens. Ils ont dû affronter de nombreuses épreuves pour venir en France, puis dans la cité d’Ango. Mais aujourd’hui, jour après jour, ils construise­nt leur avenir.

Plusieurs de ces jeunes, notamment d’origine africaine, ont trouvé des contrats d’apprentiss­age chez des boulangers de Dieppe et sa région et suivent leurs cours au centre de formation d’apprentis de la chambre des métiers de Rouxmesnil-Bouteilles. Certains sont épaulés dans leurs démarches auprès des patrons par l’associatio­n Itinérance Dieppe. Et ces jeunes font preuve d’une telle motivation que leurs maîtres d’apprentiss­age n’ont que des louanges à leur faire.

C’est le cas, par exemple, de Jean-Claude Morel qui est à la tête de la boulangeri­e située au 147, Grande-Rue à Dieppe. Depuis septembre, Sikou travaille dans son fournil. Arrivé en France à l’âge de 15 ans, le Malien s’est retrouvé tout d’abord au Havre, avant d’être hébergé dans une famille d’accueil par l’Ase, l’Aide sociale à l’enfance, au Tréport. Et désormais, tout jeune majeur, le jeune homme s’est installé dans son propre appartemen­t.

Une stabilité qui a fait partie des arguments qui ont fait pencher la balance en sa faveur lorsque Jean-Claude Morel l’a pris comme apprenti. « Et je savais qu’il avait fait un stage dans une autre boulangeri­e de Dieppe où ça s’était bien passé » , explique le boulanger.

Enfin la motivation, le courage et le sérieux du jeune homme ont également joué

en sa faveur. « C’est difficile de nos jours de trouver des jeunes motivés. Je cherchais un bon apprenti et si en plus je peux aider quelqu’un, j’en suis content » , explique JeanClaude Morel qui se dit impression­né par le parcours de son élève. Et aussi par ses capacités à apprendre les techniques enseignées : « En trois semaines, il savait façonner le pain » , souligne-t-il, bien décidé à le mener jusqu’au CAP.

À quelques pas de là, aux Pépites de pain, rue de La Boucherie, les clients ont sûrement déjà aperçu dans le laboratoir­e Mohammed et… Mohammed, deux jeunes originaire­s de Guinée et arrivés en France voilà environ un an. L’un est apprenti boulanger et l’autre apprenti pâtissier, tous deux en première année.

Si pour le jeune pâtissier le métier est une totale découverte auprès de Nicolas son maître d’apprentiss­age, le jeune boulanger a déjà exercé cette profession en Guinée, mais il a eu un choc en découvrant le matériel utilisé en France. « Chez nous, tout était fait à la main » , explique-t-il avec un éternel sourire sur les lèvres. Marie Demarais et Thomas Cohu, le couple à la tête de

cette boulangeri­e- pâtisserie, ont l’habitude de former des stagiaires et des apprentis. Ils sont notamment en contact avec la chambre des métiers et le lycée du Golf. « Nous sommes nousmêmes jeunes. Il n’y a pas si longtemps que nous sommes sortis de l’école, nous sommes donc ouverts à accueillir des

stagiaires » , explique Marie Demarais. D’autant plus si face à eux, ils ont des apprentis aussi motivés que Mohammed et Mohammed. Ces derniers sont d’abord venus faire une semaine de stage d’observatio­n.

Et comme chez Jean-Claude Morel, ces jeunes donnent

entière satisfacti­on. « Ils ont une véritable volonté d’apprendre. Ils sont très respectueu­x et nous n’avons pas à faire face à des problèmes de comporteme­nt » , souligne Marie Demarais, qui a dès le départ posé les bases comme les horaires, les objectifs… avec les éducateurs de l’Ase qui suivent les deux garçons. « Et je voulais pouvoir avoir un interlocut­eur au sein de cette

structure » , explique-t-elle. Les artisans qui forment des apprentis ont parfois des soucis avec les jeunes ou leurs parents. Pas toujours facile de leur faire admettre les contrainte­s de mé- tiers où l’on travaille le weekend, avec des horaires décalés par exemple. Mais avec ces deux jeunes, aucun souci.

Il faut savoir par exemple qu’ils sont hébergés par l’Ase dans un hôtel près du Belvédère. Ils viennent donc à vélo travailler, quelle que soit la météo et très tôt pour débuter leur journée. Et que parfois, ils ne mangent pas à leur faim. Si au départ, ils n’osaient pas en parler à leurs patrons, les deux apprentis ont compris qu’ils pouvaient compter sur eux.

En effet, Marie Demarais et Thomas Cohu vont plus loin que leur rôle d’employeurs en n’hésitant pas à aider leurs apprentis dans leurs démarches au quotidien. « Nos patrons

sont sympas, glissent avec toujours le même sourire les deux jeunes. Il y a des patrons, tes problèmes, ils s’en foutent. Là, ils font tout pour nous. Nos problèmes, c’est leur problème, on est bien tombé ! »

Mohammed le pâtissier et Mohammed le boulanger Des jeunes courageux

 ??  ?? Jean-Claude Morel (photo de gauche) a pris sous son aile Sikou, tandis que Marie Demarais et Thomas Cohu forment Mohammed et Mohammed.
Jean-Claude Morel (photo de gauche) a pris sous son aile Sikou, tandis que Marie Demarais et Thomas Cohu forment Mohammed et Mohammed.

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