Les Inrockuptibles

“je n’ai toujours pas d’adresse mail”

Son nouvel album Mastermind dans les bac, le boss du hip- hop Rick Ross nous parle des Grammy Awards, de Daft Punk, de ses amis à Miami, du Loup de Wall Street et de Notorious B. I. G.

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Tu étais à Paris pour un concert le mois dernier mais il n’y a pas de tournée. Pourquoi la France ? Rick Ross – Pourquoi pas ? J’adore la mode, j’adore les Françaises donc ça me semble être le bon endroit. Jay- Z m’a emmené en France en 2006 et j’ai eu la chance de visiter les quatre coins du pays depuis. Je commence à bien connaître. L’année dernière, j’étais à Bordeaux, j’ai bu du bon vin.

Une des bonnes surprises de ton nouvel album, c’est la présence massive de cuivres et de morceaux orchestrau­x. Comme sur Sanctified, en featuring avec Kanye West…

Ouais, j’écoute pas mal de chansons de l’époque Motown. J’ai voulu faire un disque qui correspond­e à mon ambiance du moment tout en essayant de capter l’air du temps. Le morceau dont tu parles est produit par Kanye, mais pour les refrains on a utilisé un vieux sample de Betty Wright, une grande chanteuse des seventies.

Depuis le début de ta carrière, on te compare beaucoup à Notorious B. I. G. Sur Mastermind, tu as carrément décidé de faire une reprise de l’un de ses plus gros tubes. Comment est venue l’idée ?

La première chose, c’est que Nobody est une chanson incroyable. La seconde, c’est que dès que j’ai écouté ma version, j’ai trouvé qu’elle tuait ! Alors on l’a gardée. Je respecte Biggie : on ne peut qu’être admiratif devant ce qu’il a fait pour le hip- hop. Il est de notre responsabi­lité de garder nos légendes en vie le plus longtemps possible.

Quel est ton premier souvenir d’enfance en tant que fan de hip- hop ?

Je crois que ça doit être une cassette du 2 Live Crew, un vieux groupe

“Pharrell élève la musique à un niveau supérieur”

de ma région. J’étais à l’école primaire à l’époque et je chantais le refrain comme un taré : “Hey, we want some

pussy.” Je devais avoir 9 ou 10 ans mais je n’avais déjà aucun problème avec les filles nues. A Miami, on pouvait en voir à tous les coins de rue.

Vous vous croisez souvent à Miami, Booba et toi ?

Oui, je le connais un peu, on vient de tourner un clip ensemble à Miami. Quoi qu’on en dise, cette ville est essentiell­e dans le hip- hop. C’est ma ville et j’y ai enregistré des classiques. Je ne connais pas beaucoup de rappeurs français, mais Booba a un bel avenir. Je ne comprends rien à ce qu’il raconte dans ses morceaux mais je capte l’énergie, les vibrations et l’implicatio­n du mec.

Qu’as- tu pensé du dernier album de Pharrell Williams ? Vous habitez également la même ville…

Pharrell brille dans tous les projets qu’il lance. C’est fou de constater à quel point il a toujours un temps d’avance. Il élève la musique à un niveau supérieur à chaque fois. C’est un authentiqu­e génie depuis des années. J’ai adoré travailler avec lui, surtout sur ma mixtape de 2012,

Rich Forever.

Pourrais- tu imaginer travailler avec Daft Punk ?

C’est une possibilit­é. J’aime beaucoup leur musique en tout cas.

As- tu regardé les derniers Grammy Awards ? C’est le genre de cérémonie qui t’excite ?

Avant de signer mon premier contrat, j’ai fait de la musique pendant dix ans sans gagner le moindre centime. Donc j’ai plutôt tendance à aimer l’idée que quelqu’un reconnaiss­e mon travail, que ce soit aux Grammys ou ailleurs. J’ai déjà été nommé plusieurs fois mais je n’ai jamais gagné. Ce n’est pas du tout un objectif et pour être honnête, je me fiche un peu de toutes ces conneries de récompense­s.

Que penses- tu de la scène “drill”, ce nouveau courant venu de Chicago porté par des rappeurs comme Chief Keef ou Lil Reese ?

Chacun fait ce qu’il a à faire… Je ne me sens pas concerné par ces mecs, je ne sais pas trop ce qu’ils trafiquent et parfois je me dis qu’il n’y a rien à comprendre. Mais j’adore Lil Durk ! Le morceau qu’il a sorti avec French Montana l’année dernière était fou.

Tu as invité du monde sur l’album : Kanye West, Jay- Z, Lil Wayne, des nouveaux comme The Weeknd. Comment te tiens- tu informé de l’actualité musicale ? Sur internet ?

Non, je ne vais pas trop sur le web, je ne consulte aucun site régulièrem­ent. Internet a explosé bien après mes débuts dans la musique. Je n’ai toujours pas d’adresse mail, par exemple. Pour faire les bons choix, il suffit de bien s’entourer. Avoir de bonnes idées, c’est une chose, mais il faut trouver les bonnes personnes pour les mettre en pratique. Avec The Weeknd, c’était différent car il crée tout seul dans son coin. C’est l’un des compositeu­rs les plus doués de sa génération. Je ne sais pas si les gens se rendent compte de la profondeur de ses chansons. Il était SDF et aujourd’hui il fait le tour du monde dans des palaces et des hôtels de luxe.

Quel est le dernier film que tu as vu au cinéma ?

Le Loup de Wall Street. Leonardo DiCaprio est peut- être le meilleur acteur actuelleme­nt, mais j’ai surtout aimé la performanc­e de Jonah Hill. C’est mon pote, on a fait quelques soirées ensemble avec Puff Daddy à Los Angeles et, croyez- moi, ça avait de la gueule.

Tu suis l’actualité avec une attention particuliè­re ? Bradley Manning, l’affaire Snowden, WikiLeaks…

J’essaie de m’informer mais je ne vois pas trop qui sont les mecs que tu viens de citer. Parfois tu débarques dans une chambre d’hôtel, tu allumes la télé et un avion de ligne a disparu. Alors tu te demandes comment un truc aussi dingue peut arriver et quand ils diront la vérité aux personnes concernées. Des proches des victimes semblent encore espérer une fin heureuse. Je ne voudrais surtout pas les décourager, mais bon…

Et Vladimir Poutine ? As- tu un avis sur le président de la Russie ?

Je ne veux pas faire de commentair­es déplacés, c’est délicat. Vous en pensez quoi, vous ?

Tu es d’accord pour dire que c’est un mec un peu dangereux ?

( ironique) Juste un peu, oui…

propos recueillis par Azzedine Fall et Pierre Siankowski photo Rüdy Waks pour Les Inrockupti­bles

album Mastermind ( Def Jam)

16.04.2014 les inrockupti­bles 11

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