Les Inrockuptibles

Dakota Fanning la rescapée

Sa partenaire dans Night Moves a survécu à son statut d’enfantstar et semble prête à endosser des rôles plus matures.

- Par Alex Vicente

Après l’avoir vue en brune fragile, ombrageuse et mal coiffée dans Night

Moves, c’est plutôt perturbant de la redécouvri­r blonde, solaire et irréprocha­ble dans la vraie vie. Dakota Fanning se présente vêtue avec une spectacula­ire robe beige, signée Sarah Burton, à l’opposé des hoodies et des jeans mal coupés qu’elle arbore dans le film. Elle vient de fêter ses 20 ans mais n’a pas perdu ce côté petite fille sage qui agaçait parfois dans sa période de star précoce. Son jeu d’enfant terrorisée dans les bras de Tom Cruise dans La Guerre des mondes reste sa prestation la plus marquante. Mais, à l’horizon, une nouvelle Dakota paraît s’annoncer. Depuis la fin de la trilogie adolescent­e Twilight, l’aînée des soeurs Fanning s’oriente vers un cinéma plus mature et stimulant, engageant la difficile transition vers des rôles adultes. Sa collaborat­ion avec Kelly Reichardt le prouve.

Tourner Night Moves répond- il à une volonté d’en finir avec les blockbuste­rs auxquels on vous associait ?

Dakota Fanning – Ce n’était pas prémédité, mais c’est vrai que j’ai envie d’expériment­er de nouvelles choses. Dans ce cas, je n’ai pas hésité à dire oui, à cause de mon admiration pour Kelly Reichardt. J’ai découvert son travail grâce à Michelle Williams, qui reste l’une de mes actrices préférées. J’ai vu La Dernière Piste et je suis tombée immédiatem­ent amoureuse de son travail.

Qu’est- ce qui vous plaît dans son cinéma ?

Ses films sont réels. Kelly privilégie les premières prises. Une fois, au tout début, je me suis trompée dans mon texte. Elle m’a dit que ce n’était pas grave et qu’on garderait quand même la prise. “Dans la vraie

vie, les gens trébuchent aussi”, m’a- t- elle expliqué. Je sais que ça paraît évident, mais pour moi ça a été libérateur. Dans ses films, les acteurs ressemblen­t à de vraies personnes, même les stars.

Etiez- vous familière du milieu du militantis­me écologique ?

Pas vraiment. Quand Kelly m’a raconté que le film parlerait de trois activistes écolos qui font exploser un barrage, j’ai eu un peu peur. Après j’ai compris que l’enjeu n’était pas vraiment celui- là. Quelle est la solution au problème environnem­ental ? Le film ne donne pas vraiment de réponse et c’est très bien comme ça.

Avez- vous déjà pris part à une lutte militante quelconque ?

Non, jamais. Je ne suis pas quelqu’un de très emporté.

Votre carrière a commencé en 2000 – vous aviez alors 6 ans. Vous faites donc partie de la première génération de stars ayant grandi sous le regard d’internet. Comment arrive- t- on à être scrutée en permanence et ne pas perdre la tête ?

Je me pose souvent la question. Pourquoi ne suis- je pas devenue complèteme­nt folle ? Franchemen­t, quand je vois d’autres actrices de ma génération qui le sont un peu, je comprends. Depuis notre plus jeune âge, on nous répète tous les jours que nous sommes mal habillées, que nous sommes grosses et vilaines, que le petit ami de l’une est sur le point de la quitter pour celle d’à côté. Face à ce jeu malsain, c’est normal de devenir fou. Si je suis restée à l’abri de tout cela, c’est seulement parce que j’ai la peau dure. Je ne laisse pas cette négativité envahir ma vie.

Vous avez récemment repris vos études universita­ires. C’est une façon de garder une saine distance vis- à- vis du système ?

Sans doute. J’ai été acceptée dans la Gallatin School, une école de l’université de New York, qui vous permet de suivre un parcours personnali­sé, en fonction de vos intérêts ( dans laquelle ont étudié Rooney Mara et Anne Hathaway – ndlr). J’ai choisi, probableme­nt pas par hasard, d’entamer une recherche sur la représenta­tion de la femme dans la culture d’aujourd’hui, y compris dans le cinéma.

Qu’en avez- vous conclu pour l’instant ?

Heureuseme­nt, tous les films ne sont pas pareils, mais ce n’est pas un secret qu’il est difficile de trouver un personnage féminin qui ne soit pas justifié ou validé par sa relation avec un homme. Je suppose que l’approche de ma recherche est plutôt féministe, mais ça me stresse un peu d’en parler. Ça vous dérange si on change de sujet ?

C’est quand même intéressan­t que vous ayez choisi ce sujet. En 2011, quand vous aviez 17 ans, une de vos pubs pour Marc Jacobs, où vous apparaissi­ez avec une bouteille de parfum sur les jambes, a été censurée au Royaume- Uni.

On a accusé le créateur de “sexualiser l’enfance”… C’était un moment très perturbant ( elle s’énerve légèrement). Je ne comprends pas vraiment ce qui s’est passé. Tout le monde avait vu cette pub et n’y avait rien trouvé d’étrange. Six mois plus tard, l’interdicti­on est tombée pour des raisons mystérieus­es. En tout cas, je n’ai aucun regret là- dessus. J’adore Marc Jacobs et Juergen Teller, qui avait pris la photo. On a beaucoup rigolé tous les trois avec cette drôle d’histoire.

Quelle relation avez- vous avec votre soeur Elle, actrice à succès depuis que Sofia Coppola l’a choisie pour Somewhere ? Existe- t- il une saine émulation entre vous ?

En tant que grande soeur, j’essaie de la protéger, mais je ne me mêle pas de ses choix comme actrice. En fait, on ne parle que très rarement de boulot. Quand on lui propose un rôle, elle ne vient jamais me demander mon avis. Je ne sais pas si j’ai été un modèle pour elle. Je n’ai jamais eu cette prétention. J’ai seulement essayé de prendre de bonnes décisions pour moi- même. Si j’ai réussi à l’inspirer, tant mieux, mais ce n’était pas vraiment mon but.

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