Les Inrockuptibles

Todd Terje

It’s Album Time Olsen Records/ Pias Entre electro, funk, disco, humour et élégance, Todd Terje décide de ne pas choisir. Déjà un classique de 2014.

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L’ heure de l’album a enfin sonné pour Todd Terje. Et avec le bien nommé It’s Album Time, le producteur norvégien justifie de la plus belle des manières l’impatience démesurée de sa fanbase internatio­nale. Car avant de plaquer sa folie discoïde sur un long format, Terje Olsen ( son vrai nom) a subtilemen­t laissé gonfler les attentes de ceux qui le suivent sur les réseaux sociaux, notamment depuis la sortie du tube Inspector Norse en 2012. Le morceau affiche aujourd’hui près de trois millions de clics sur YouTube ; il s’agit pourtant de la moins élégante des créations compilées sur la première grande collection du Scandinave.

L’introducti­on du disque dure moins de deux minutes. Beaucoup plus de temps qu’il n’en faut à Todd Terje pour façonner une progressio­n épique et scander en une quinzaine de murmures “It’s album time”. Le musicien semble avoir imaginé tous les coins et recoins du dédale sonique qu’il s’apprête à déballer. Dans la foulée, Leisure Suit Preben et Preben Goes to Acapulco ouvrent la porte des sixties pour révéler une vue infinie sur une mer de claviers vintage. Le mirage de sons réussit l’exploit de convoquer des souvenirs cristallin­s disparus depuis les derniers signaux émis par François de Roubaix et les grands disques de Jean- Jacques Perrey.

Etablir des liens entre les genres et les génération­s, confronter les styles et les cultures, c’est là tout l’intérêt de ce premier album érudit. Le long d’enchaîneme­nts souvent contradict­oires mais toujours précis, le Norvégien esquive avec une classe folle tous les pièges tendus par les risques insensés qu’il s’autorise. Exemple idéal en milieu d’album avec Svensk Sås et ses rythmes effrénés empruntés à la samba, au beat- box et à l’electro. Tandis que Strandbar ne cache pas ses références aux notes de piano limpides, façon house de Chicago, Delorean Dynamite roule les portières grandes ouvertes sur 2014 avec ses grosses basses rondes et son riff de guitare disco. Mais le vrai bijou de l’album reste la reprise de Johnny and Mary, ballade glaçante soufflée par Robert Palmer en 1980. Pour y chanter la nostalgie, Todd Terje invite la voix impérieuse de Bryan Ferry, dont il avait déjà remixé le classique Don’t Stop the Dance en 2013.

La beauté de l’instant pourrait avoir valeur d’épilogue mais le producteur décide de relancer les bpm dans une fin d’album débridée où l’influence de Daft Punk ( Swing Star Part 2) vient croiser celle de Giorgio Moroder ( Oh Joy). Recette parfaite pour éterniser l’addiction et imaginer la boîte de nuit depuis la solitude du casque audio. Azzedine Fall

toddterje. com

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