Aux marches du Palais
Faites vos jeux ! La sélection du Festival de Cannes a été dévoilée la semaine dernière. Peu de surprises mais de beaux espoirs, et le retour-événement de Godard.
LJulianne Moore dans de David Cronenberg, en sélection officielle a rituelle conférence de presse cannoise, tenue le 17 avril, était inaugurée comme d’hab par un petit discours du président Gilles Jacob. Peut-être pour la dernière fois, puisque celui-ci n’occupera plus cette fonction en 2015, remplacé par Pierre Lescure. Le président a pourtant choisi de faire sobre et de ne pas entonner la mélopée des adieux (de fait, s’il quitte la présidence, il ne devrait pas pour autant quitter totalement le festival). Dans la foulée de cette courte allocution, le délégué général et donc sélectionneur en chef Thierry Frémaux a annoncé sa sélection 2014, soulignant que vingt-huit pays seraient représentés presque autant qu’en 2013, et que quinze films étaient réalisés par des femmes. On aura compris l’allusion à la polémique sur l’absence de femmes en sélection
on se réjouit que Godard soit remis dans la course et pas simplement posé sur une étagère honorifique
officielle il y a deux ans et on nuancera en signalant qu’on n’en compte que deux parmi les dix-huit films en compétition.
La plus grande satisfaction de cette sélection concerne le choix des films français. Avec Bertrand Bonello (troisième présence en compétition) et Olivier Assayas (quatrième), le festival marque à la fois sa fidélité à certains auteurs, mais tient surtout deux projets atypiques et particulièrement excitants dans le parcours de leurs auteurs : le premier gros budget de Bonello (son biopic de Saint Laurent, avec un casting plus que sexy), et l’irruption dans le cinéma d’Assayas d’une jeune star hollywoodienne, Kristen Stewart (partenaire de Juliette Binoche dans Sils Maria). Mais la belle surprise est le grand retour en compète de Jean-Luc Godard (treize ans après Eloge de l’amour, son dernier film en compétition). On se réjouit qu’avec son Adieu au langage en 3D , Godard soit remis dans la course et pas simplement posé sur une étagère honorifique (hors compétition, séances spéciales ou autres). Michel Hazanavicius clôt cette sélection française, avec The Search, annoncé comme un film de guerre en Tchétchénie (avec le Prix d’interprétation féminine 2013, Bérénice Bejo). Trois films français sont sélectionnés à Un certain regard : Bird People de Pascale Ferran, La Chambre bleue de Mathieu Amalric et un premier film, Party Girl de Marie Amachoukeli, Claire Burger et Samuel Theis (tous trois de la Fémis, ils ont cartonné avec leurs courts), qui fera l’ouverture de la sélection.
Trois films de réalisateurs canadiens également : Mommy de Xavier Dolan, pour la première fois en compétition, Maps to the Stars de David Cronenberg (bénéficiant d’un casting très hollywoodien – Robert Pattinson, Julianne Moore, Mia Wazikowska…) et Captive d’Atom Egoyan.
Sinon, peu de surprises. Les “grands auteurs” habituels de Cannes seront présents : les Dardenne ( Deux jours, une nuit, avec Marion Cotillard), Ken Loach ( Jimmy’s Hall, film historique qui aura à nouveau pour cadre l’Irlande, comme Le vent se lève, Palme d’or en 2006), Nuri Bilge Ceylan (Sommeil d’hiver), Mike Leigh ( Mr. Tuner, un biopic du peintre Turner de plus de deux heures…), Naomi Kawase (Deux fenêtres), Andrey Zvyagintsev (Leviathan), l’auteur du Retour, du Bannissement et d’Elena, Abderrahmane Sissako (Timbuktu), auteur de Bamako…
A noter pourtant de nouveaux venus avec Le Meraviglie, le nouveau film de l’Italienne Alice Rohrwacher, dont le premier long, très beau, Corpo celeste, avait été présenté à la Quinzaine des réalisateurs il y a deux ans, et Relatos salvajes de l’Argentin Damián Szifrón, un film à sketches produit par Pedro Almodóvar.
Absents à l’appel et pourtant souvent évoqués : Abel Ferrara (absence que Frémaux n’a pas voulu commenter), Emir Kusturica (qui n’a “pas du tout terminé”) et Terrence Malick, qui “fignole”, selon le mot du délégué général. Jean-Marc Lalanne et Jean-Baptiste Morain