Les Inrockuptibles

“n ous aurions pu rester au gouverneme­nt”

Coprésiden­te du groupe Vert à l’Assemblée, la députée écologiste Barbara Pompili revient sur la rupture avec Manuel Valls, le refus de voter le programme de stabilité, les élections européenne­s et le sexisme.

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Apeine nommé, Manuel Valls est- il déjà fragilisé ? Barbara Pompili –

Pourquoi avez- vous décidé de ne pas voter le programme de stabilité budgétaire du gouverneme­nt, plan qui prévoit d’économiser 50 milliards d’euros pour ramener le déficit à 3 % du PIB ?

Nous considéron­s qu’il faut un véritable virage dans la politique économique menée et, pour l’instant, nous ne le voyons pas arriver. Au moment où les Français ont fait savoir via les urnes qu’ils souhaitaie­nt un infléchiss­ement de la politique d’austérité, le gouverneme­nt continue à faire reposer les plus gros efforts sur les ménages, ce qui devient de plus en plus insupporta­ble pour les salariés et les retraités les plus modestes. Cette trajectoir­e est trop raide et pas assez étalée dans le temps.

La semaine dernière, vous avez été longuement reçue à Matignon par Manuel Valls. Etait- il ouvert à la négociatio­n ?

Je reconnais qu’il y a plus d’interactio­n entre Manuel Valls et les parlementa­ires qu’avec Jean- Marc Ayrault. C’est une bonne méthode de travail mais ses marges de manoeuvre sont limitées.

N’est- il pas paradoxal de louer la capacité d’écoute de Manuel Valls mais d’avoir refusé de participer à son gouverneme­nt ?

La décision de ne pas participer au gouverneme­nt a été prise dès qu’il Manuel Valls devient Premier ministre à un moment extrêmemen­t délicat. Il doit montrer qu’il a entendu l’appel des Français et qu’il est capable de créer une réelle synergie avec les parlementa­ires. S’il le fait il ne sera pas fragilisé, bien au contraire. a été nommé. Nous ne l’avons rencontré que le lendemain de sa nomination.

Manuel Valls semble avoir tout fait pour retenir Europe Ecologie- Les Verts ( EE- LV), non ?

C’est vrai qu’il nous a fait une offre très intéressan­te en nous proposant un grand ministère de l’Ecologie comprenant l’Energie et les Transports. Il était prêt à nous confier les manettes pour piloter la transition énergétiqu­e et il nous avait promis d’injecter une dose de proportion­nelle lors des futures élections.

Contrairem­ent à Cécile Duflot, vous pensez que c’était une erreur d’avoir refusé cette main tendue ?

Oui, car je pense qu’il faut toujours mieux essayer que renoncer avant d’avoir tenté le coup. J’étais très méfiante comme d’autres camarades écologiste­s sur les moyens effectifs que nous aurions pour mener à bien cette transition énergétiqu­e. En outre, la politique économique annoncée par le président de la République réduit considérab­lement les marges de manoeuvre pour investir. Mais je pense que c’était trop tôt pour démissionn­er. Cécile Duflot et Pascal Canfin ont estimé qu’ils avaient avalé trop de couleuvres au gouverneme­nt durant deux ans pour croire de nouveau à François Hollande. Cette ligne l’a emporté.

Est- ce une démarche personnell­e de leur part ?

Oui, car Cécile Duflot et Pascal Canfin ont fait un communiqué en annonçant qu’Europe Ecologie quittait le gouverneme­nt avant même que nous ne soyons réunis pour en discuter collégiale­ment.

Pensez- vous que cette décision réponde à une volonté de reprendre en main l’appareil ?

J’ai lu cela dans la presse, ou encore que c’était pour marquer des points en vue des européenne­s. Mais avoir une vision à si courte vue serait suicidaire pour notre parti donc je pense que Cécile Duflot et Pascal Canfin étaient sincères.

N’y a- t- il pas le risque d’un repli identitair­e d’EE- LV ?

Ce risque existe, c’est certain. Notre parti a toujours été traversé par un courant de gouverneme­nt et par un courant contestata­ire. Cette coexistenc­e ne va pas de soi. Je continue de penser que nous aurions pu rester au gouverneme­nt et faire un bilan à la fin du quinquenna­t. Pour l’instant, nous ne pouvons pas gagner tout seuls. Je le regrette mais c’est comme ça…

Pensez- vous qu’EE- LV puisse rééditer son score des européenne­s de 2009 – 16,3 % des voix ?

La situation politique est différente et le fait que Daniel Cohn- Bendit ne soit plus là va sans doute avoir des conséquenc­es très fortes. Même si on a de très bons candidats, ils n’ont pas encore sa stature. Mais je pense que nous pouvons faire un score très honorable.

Lors de son discours d’adieu au Parlement européen, Daniel Cohn- Bendit a réaffirmé que le fédéralism­e était le seul avenir pour l’Europe. EE- LV ne devrait- il pas davantage défendre le projet d’une Europe fédérale ?

L’économie a pris le pas sur la politique dans la constructi­on européenne. Pour l’instant, les égoïsmes nationaux nous empêchent de mener une véritable politique européenne. On le voit chaque jour sur la scène internatio­nale. C’est le manque d’Europe qui crée des problèmes…

Qu’avez- vous pensé de la décision du Supplément, sur Canal+, de diffuser une séquence off de Jean- Vincent Placé ?

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