Miroir déformant
Dans Black Mirror, la “bonne” télé critique la “mauvaise” et aussi les nouvelles technologies. Une démonstration un peu appuyée.
Aforce de leur dire qu’elles décrivent le monde d’aujourd’hui mieux que n’importe quelle autre forme artistique, certaines séries ont peut- être fini par se prendre un peu trop au sérieux. L’hypothèse affleure devant Black Mirror, qui arrive enfin en France, deux ans et demi après la diffusion de sa première saison sur Channel 4 en Angleterre – la deuxième est passée début 2013.
Construite comme une anthologie, avec des épisodes indépendants les uns des autres, cette création de Charlie Brooker s’intéresse à l’addiction contemporaine aux images et aux gadgets technologiques ainsi qu’au voyeurisme attenant. Vaste programme. Dans le chapitre inaugural, alors que
l’action se situe dans un monde parallèle au nôtre, mais bien sûr tout proche
la princesse d’Angleterre est enlevée à Londres, un ravisseur exige que le Premier ministre couche avec un cochon en direct à la télévision. Sinon, il exécutera la jeune femme... Dans le suivant, la téléréalité type X- Factor en prend pour son grade. La série fonctionne sur un parti pris simple : jouer simultanément sur des effets d’anticipation et de réalisme. L’action se situe dans un monde parallèle au nôtre ( où les “points de vie” sont liés au nombre de publicités que l’on accepte de regarder, par exemple), mais bien sûr tout proche.
Quelques moments émouvants peuvent survenir çà et là, quand la domesticité – sujet télévisuel central – est placée au centre du jeu. Mais on comprend assez vite que Black Mirror fronce les sourcils avec peu de subtilité et ressemble un peu aux fictions politiques eighties type Le Prix du danger, qui avaient elles- mêmes mal digéré Guy Debord – déjà. Trente ans plus tard, le repas reste indigeste, malgré les apparences de la modernité. Olivier Joyard Black Mirror saisons 1 et 2, à partir du 1er mai, 22 h 30, France 4