Retour à Fort McMoney
Cinq mois après sa mise en ligne, le documentaire interactif de David Dufresne fait toujours débat jusque dans les églises de Fort McMurray, cette ville canadienne où le pétrole a rendu fous les habitants.
L’ idée de présenter une matière documentaire sous forme de jeu vidéo, ça a vraiment marché”, s’enthousiasme David Dufresne, journaliste français de 46 ans et démiurge de Fort McMoney. “Ça prouve qu’on peut tenter des choses dans l’écriture et que le public est prêt à suivre si ça vaut le coup. Pour un réalisateur, c’est très motivant de le savoir.” Des centaines de milliers d’internautes se sont approprié son dernier webdocumentaire “gamifié”, une aventure interactive dont vous êtes le héros, fondée sur un travail d’enquête bien réel à Fort McMurray, au coeur d’une cité canadienne qui grossit, fume et bedonne comme un champignon hideux sur la plus grande réserve de sables bitumeux au monde. Depuis la mise en ligne, le 25 novembre 2013, 1 488 000 pages ont été vues et 410 000 visiteurs ont sillonné les routes virtuelles de ce paysage urbain pour le moins chaotique.
Les chiffres impressionnent, mais le bilan de Fort McMoney
ne se lit pas seulement dans les statistiques. Comme souvent pour les webdocs interactifs, la qualité de la relation avec chaque joueur et son investissement individuel importent autant que le nombre de connexions. “L’audience est un critère qui vient du monde de la télévision, confirme Dufresne. En revanche, ce qui me semble très significatif, ce sont les 7 000 contributions aux débats sur le site. On a quand même réussi à fonder une communauté en très peu de temps. Des joueurs ont ouvert spontanément une page Facebook pour s’entraider et discuter du jeu, d’autres m’ont envoyé leur parcours, qu’ils avaient retracé à la main sur une carte de la ville. L’entreprise Suncor, qui exploite les sables bitumeux, a recommandé à ses employés de participer au jeu. Il y a même un curé de la Fort McMurray Alliance