Les Inrockuptibles

Réinventon­s- nous grâce aux inRocKs

La semaine dernière, du sang et des larmes, un moment de reconquête, une lutte à mains nues, des périodes sombres et une université d’été.

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Salut les campeurs ! Et haut les coeurs, il est 6 h !” 18 heures. Pile poil. L’heure à laquelle j’ai rendez- vous dans un café avec Jeanne, cette belle histoire passée qu’il ne faudrait pas abîmer en n’étant pas bons amis. Tu parles. Cette petite conne dont l’absence a niqué mon été. J’ai avalé une vodka au bar – ça donne du courage mais pas mauvaise haleine –, révisé une à une les répliques qui font mouche, répété le rôle, détaché, indifféren­t, amusé, aussi joyeusemen­t cruel que lorsque je faisais brûler des criquets à la loupe en colo. T’es un killer, Berthier, un killer. Il va y avoir du sport, “du sang. Et des larmes. Du beau spectacle”. Comme ce qu’on pouvait espérer de l’université d’été du PS à La Rochelle. Tout peut arriver “et même le pire (…) pourquoi pas l’explosion (…) l’incendie ?” Ça va chier des bulles. La souffrance va changer de camp. Comme dit Antoine de Caunes, “le moment est venu de la reconquête”. Il était temps.

dans le miroir des toilettes du bistrot où nous avons rendez- vous, je ne sais pas, mais ça fait un choc. Comme dit Alt- J, “c’est comme lorsqu’enfant, vous ne voyiez pas votre grand- mère pendant un an. Au moment des retrouvail­les, vous lui sembliez avoir énormément grandi, ne plus être ce garçon qu’elle avait quitté un an plus tôt. Vous aviez pourtant le sentiment d’être resté le même”. Je suis à la fois la grand- mère et l’enfant. Que suis- je devenu ? J’avais cru, juste après la rupture, que cet enfer était une renaissanc­e. Il y avait la tempête, la douleur, le combat, la vie, quelque chose, enfin ! Je souffrais, je me battais, j’étais un héros. Mais “après avoir lutté à mains nues contre une demi- douzaine de vampires, tranché violemment à la hache les têtes d’une horde de zombies affamés et semé un loup- garou particuliè­rement irrité dans une course folle à travers une forêt obscure”, le tourbillon se calme. Les insomnies laissent place au sommeil, le sommeil envahit les nuits et les jours. Plus d’orages. Ne reste que la tristesse.

Mais c’est fini, tout ça ! L’heure de la victoire a sonné, ce moment où, comme dit Luke Pritchard, le leader des Kooks, tu réalises “qu’une période aussi sombre peut déboucher sur des changement­s aussi positifs”. Dé- ta- ché. Affable, drôle, cruel… Je suis prêt. Elle entre dans le bar. Je plonge dans mon journal pour faire semblant de ne pas l’avoir vue. Mains moites. Elle a mis sa robe jaune poussin. J’adore. Elle balance, la conne, non mais qu’est- ce qu’elle envoie… “Elle est belle, avec de longs cheveux noirs comme des promesses.” Et merde. Le Foenkinos en moi a repris le pouvoir. Mon sourire débile débarque. Les répliques malignes s’évaporent et j’ânonne un compliment crétin qui la laisse froide. “Réinventon­s- nous.” C’était le projet de l’université d’été de La Rochelle et le mien. C’est “raté pour cette année”. Alexandre Gamelin

C’est la vodka, peut- être. Ou l’eau froide dont je me suis aspergé le visage. Ou tout simplement ma gueule de cocker

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