Katell Quillévéré
Ses deux premiers films lui ont valu une belle estime critique et un vrai succès public ( Un poison violent, Suzanne). Elle est aussi un membre actif de la Société des réalisateurs français. As-tu confiance dans l’avenir du cinéma français ? J’ai un sentiment mélangé. D’un point de vue artistique, je suis plutôt optimiste. Notamment sur ma génération. Je sens à la fois une force, une capacité d’adaptation au système tel qu’il évolue, une audace. En même temps, la situation est inquiétante. Particulièrement celle de l’exploitation. Quelque chose va mal dans la place qu’ont les films pour être vus. Le réseau de salles art et essai est dans une concurrence féroce avec les multiplexes. Or le cinéma d’auteur qui réussit à trouver un public, c’est d’abord par le soutien de ces salles. Même si certains multiplexes font un travail de défrichage, ils ne font presque jamais de soutien sur la longueur. Que penses-tu de l’arbitrage par les pouvoirs publics de cette concurrence ? Il faut du courage politique pour réguler cette jungle libérale. C’est un chantier du CNC et du gouvernement. On attend de voir. L’autre mutation essentielle, c’est la possibilité que les films soient vus sur internet et en salle simultanément. Que va devenir la salle dans cette configuration ? Evidemment, les groupes (UGC, Gaumont, Pathé…) qui pensent qu’il y a trop de films qui encombrent les salles voient là l’occasion d’écarter les films dits “fragiles”, le cinéma d’auteur… C’est une façon d’organiser l’échec de ces films-là et c’est hyper dangereux. La VOD est-elle appelée à modifier la donne ? Pour cela, il faudrait que les fournisseurs d’accès participent au financement du cinéma. Et là encore, c’est une question de courage politique. propos recueillis par Jean-Marc Lalanne