Une voix qui fait tourner la tête, et qu’une simple guitare suffit à sublimer

cours de guitares à partir de 14 ans. L’école, en revanche, Florence l’a délaissée petit à petit avant de quitter complètement le circuit à 17 ans.

Pendant ces trois années, l’adolescente construit doucement son projet. Elle commence très classiquement par jouer des reprises, qu’elle poste depuis sa chambre sur son compte MySpace sous le nom de 9Mary. Et ce qui devait arriver arriva : “J’ai fini par oublier mon mot de passe… Il a fallu écrire plusieurs fois au site pour qu’ils fassent disparaître tout ça ! Ne cherchez pas, vous ne trouverez rien.” De cette époque subsiste toutefois le clip home-made de son premier morceau abouti, Show Me, tourné en super-8 avec son frère et qu’on peut toujours visionner en fouillant un peu sur internet. Le morceau, lui, se retrouve aujourd’hui en ouverture de Tomorrow Will Be Beautiful.

Tout un symbole quand on apprend que c’est par lui qu’Aram Goldberg, le manager de Devendra Banhart (dont Flo Morrissey est fan), découvre la jeune fille via un blog japonais et décide d’entrer en contact avec elle – le début des choses sérieuses. “J’ai eu beaucoup de chance”, dit-elle. De la chance, oui, mais aussi une voix qui fait tourner la tête, et qu’une simple guitare suffit à sublimer. Une voix, aussi, pas vraiment de son âge : qui donc peut bien chanter ainsi à 15 ans ?

Toujours à Notting Hill, depuis la boutique Rough Trade jusqu’à l’excellent pâtissier portugais du coin, la discussion s’oriente vers l’expression anglaise “old souls”, ces gens habités par des émotions qui semblent tombées du ciel, comme passées par d’autres personnes et d’autres époques. Un truc quasi mystique que Flo Morrissey balaie tout en laissant planer l’idée d’une inconnue, d’un facteur manquant à une parfaite maîtrise de son art. Elle dit d’ailleurs vouloir écrire “des chansons intemporelles, qu’on écoutera de la même manière dans dix ou vingt ans, et qui ne disent rien de leur époque en particulier, ni de l’âge de la personne qui les chante”. Une façon de sortir de soi telle une chamane en équilibre entre deux mondes.

Flo Morrissey envisage de quitter Londres pour Paris. En flânant d’un stand à l’autre du marché de Portobello,

elle demande conseil sur les quartiers sympas, les bons restos, les choses à découvrir. Elle avoue être un peu effrayée à l’idée de quitter le domicile familial, mais l’ex-ado semble enfin assumer ses vieilles envies de France et d’indépendance. “Je baigne, depuis l’enfance, dans des références françaises. J’adore des personnages comme Françoise Hardy et Jane Birkin, elles ont une façon de chanter très spéciale, unique, qui semble intemporelle. J’aimerais bien écrire en français… J’ai déjà repris L’amour est bleu, qu’a chantée Vicky Leandros à l’Eurovision en 1967.”

Aucune trace de L’amour est bleu sur son premier album, mais d’amour il est question tout de même. L’amour qu’on lui porte, déjà, et puis l’amour comme toile de fond à des chansons qui, au-delà des textes et des thèmes explorés, recherchent l’intemporalité en visant les sentiments plutôt que l’intellect. Outre le splendide single Pages of Gold, tube d’une élégance troublante et rare, Tomorrow Will Be Beautiful regorge ainsi de titres à la beauté vaporeuse, légère, pastel, qui dessinent en creux le portrait d’une jeune fille qui décide de vivre après avoir beaucoup rêvé. L’album a d’ailleurs été enregistré à Los Angeles, berceau du fantasme californien, avec le producteur Noah Georgeson (proche notamment de Devendra Banhart – encore lui).

Pour Flo Morrissey, qui a passé deux mois sur place, ce sont beaucoup de rêves qui se réalisent. “J’ai beaucoup appris avec Noah. Mes idées étaient prêtes, mais il m’a permis de les diriger dans la bonne direction.” Des idées cool pour une fille super, qu’on retrouvera une nouvelle fois sur scène, en novembre, au festival les inRocKs Philips 2015. album Tomorrow Will Be Beautiful (Glassnote/Caroline) concert le 15 novembre à Paris (La Cigale) dans le cadre du Festival les inRocKs Philips