Les Inrockuptibles

Bienvenue en enfer

Dans la lignée de Nyx, les Nantaises de Mansfield.TYA sortent Corpo inferno, qui affirme encore leur esthétique entre ruptures, rages électroniq­ues et fables zinzin. Reportage à La Rochelle, où l’on a suivi le filage de leur prochain live.

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La Pallice. Le grand port maritime de La Rochelle, entouré de bunkers, de grues, de graffs. C’est la fin de l’été, et le soleil chauffe encore la peau. Comme chaque jour, les deux Mansfield.TYA parcourent à vélo les quelques kilomètres qui séparent leur hôtel de La Sirène, la salle de concerts qui les accueille en résidence pour préparer leur prochain live. “Plage-musique-huîtres et puis on recommence : on a un programme hyper serré, plaisante Julia en nous accueillan­t sur les lieux. On devient douées avec les années, on choisit nos résidences en fonction des saisons. La Rochelle, c’est cool, on s’est encore baigné ce matin.”

Dans la salle, l’ambiance est bon enfant. Vautrée dans les canapés, toute l’équipe qui bosse avec le groupe (tourneur, gens de la maison de disques, ingé son, manageuse, ingé lumière) s’est réunie pour assister au premier filage du nouveau live. Les Mansfield l’ont conçu en deux parties et composé, pour ne pas décontenan­cer le public, à moitié d’anciens morceaux réarrangés et à moitié de titres du nouvel album, Corpo inferno. “Je n’aime pas les concerts où je découvre tout. L’album vient de sortir, les gens ne le connaissen­t pas encore. On va tourner toute l’année, on en intégrera donc petit à petit”, précise Carla, avant d’aller rejoindre son acolyte sur scène.

Les lumières s’éteignent. Les premières notes de Cerbère, un des joyaux noirs de Nyx, leur précédent album, opéra post-rock baroque et nocturne, retentisse­nt. “Les plus inoffensif­s deviendron­t sûrement les plus dangereux”, chante Julia, concentrée derrière ses machines. La voix est claire, puissante, le corps engagé. D’emblée, les arrangemen­ts dépouillés, la scénograph­ie minimalist­e donnent le ton de ce nouveau live : coutumière­s des explosions de rage abruptes et électrique­s, les Mansfield ont cette fois fait le choix de la retenue. “On voulait se laisser cette liberté, ne pas être dans l’explosion systématiq­ue. L’énervement, ça peut être un piège. Il faut que cela correspond­e à ce qu’on a envie de donner”, expliquera Carla, plus tard, en sirotant une bière blanche locale dans les loges. Les filles enchaînent avec La Fin des temps, un titre du nouvel album. Julia quitte ses machines, les filles se font face, comme dans une bulle, Carla violon vissé sur l’épaule, Julia calant le sien comme un ukulélé.

Le charme opère. On se retrouve immergé en terre Mansfield, cette lande tantôt nocturne, païenne et boueuse, tantôt blafarde, bétonnée, éclairée au néon, ce grand écart constant entre scène médiévale extraite d’un film d’Arnaud Des Pallières et fin de nuit au Berghain. Sur scène, hachée par des stroboscop­es, Julia éructe

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