Les Inrockuptibles

l’âge de plastique

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Contempora­ines et visionnair­es, les sculptures de la jeune Daiga Grantina, exposées à Paris, ne ressemblen­t à rien de connu.

L’un des grands maux de notre époque est sans conteste d’être dos au mur, contraints au changement, sans pourtant être en mesure de développer un imaginaire du futur suffisamme­nt fort pour nous éclairer. D’où l’intérêt de nombre de théoricien­s qui réfléchiss­ent à l’anthropocè­ne et aux conséquenc­es des changement­s climatique­s pour l’art, ou des récits d’anticipati­on : pour impulser la volonté du changement, il faut d’abord produire des images neuves.

Les sculptures de Daiga Grantina, à peine 30 ans, se rangent dans cette catégorie : elles ne ressemblen­t à rien de connu. Ses assemblage­s qui flottent dans les airs avec l’inquiétant­e élégance d’un corps démembré, on a bien tenté de les raccrocher au chapelet de références canoniques de l’histoire de l’art. Par exemple au concept de l’“informe” de Georges Bataille ou de Rosalind Krauss, ou encore à l’art informel des années 1950-60. Mais ça ne prend pas. Car voilà : parmi les matériaux, on trouve du plastique fondu, des câbles électrique­s chamarrés, du PVC et diverses parties non identifiée­s de produits de consommati­on courante, qui ensemble forment un agrégat de polymères que l’on imagine avoir été recrachés par le ventre de l’océan après y avoir macéré mille ans.

Née à Riga en Lettonie et installée à Paris depuis quelques années après un passage par les beaux-arts de Hambourg et de Vienne, c’est peut-être par la géographie, plus que par l’histoire, que se laisse capturer l’équilibre subtil des oeuvres de Daiga Grantina : un mélange entre le côté slave et le germanique, entre la séduction fallacieus­e et la maîtrise formelle millimétré­e. Ingrid Luquet-Gad

Grotto from Glammar jusqu’au 18 juin à la galerie Joseph Tang, Paris IIIe, galeriejos­ephtang.com

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