Les Inrockuptibles

Dirty dancer

Après la soul seventies, l’impression­nant Sean Tillmann, alias Har Mar Superstar, s’attaque à la pop synthétiqu­e des années 80 avec la même truculence et un sens du show inimitable.

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Le petit mec dégarni et replet en sweat à capuche et T-shirt Cate Le Bon, ce n’est pas le roadie ou l’attaché de presse. C’est la superstar. Har Mar Superstar. Qui n’est pas le vrai nom de Sean Tillmann. Son pseudo lui vient du HarMar Mall, le centre commercial de Roseville, dans la banlieue de Saint Paul (Minnesota), où Sean allait plus jeune pour voir des films. Et Superstar, parce qu’il en a l’étoffe, et qu’il est l’ami des stars.

En France, beaucoup l’ont découvert en 2013 avec son album Bye Bye 17, un chouette disque de soul seventies toujours du bon côté de la nostalgie, qui a surtout permis à Har Mar Superstar de faire des concerts chez nous et de déployer ses talents de showman aussi imbattable qu’improbable. Har Mar Superstar sur scène, c’est Prince dans le corps de Katerine, sans complexes et avec un humour tordu irrésistib­le. Funky funny, vrai chanteur porté sur le strip-tease et les chorégraph­ies risquées, pure boule d’énergie et gros maboul à facettes.

Marqué dès son plus jeune âge par les disques de Prince (un artiste local du Minnesota) et Michael Jackson, Sean Tillmann a eu son premier groupe à 12 ans. Une poignée d’années plus tard, il jouait de la basse torse nu dans Calvin Krime, un viril groupe de punk hardcore, façon Hüsker Dü ou Replacemen­ts. Ensuite, à l’aube du troisième millénaire, il a été leader d’un groupe indie-pop nommé Sean Na Na, et c’est là que tout a basculé. “A un moment, on s’est mis à jouer une reprise de R. Kelly, je lâchais ma guitare pour pouvoir danser, et j’ai réalisé que ça devenait mon moment préféré dans les concerts de Sean Na Na. J’ai donc décidé d’en faire un nouveau projet, qui est devenu Har Mar Superstar. Mais un blanc-bec joufflu de 21 ans qui fait du r’n’b, ce n’était pas très crédible. J’ai donc créé une sorte de personnage excentriqu­e, inattendu.”

Dans sa période hollywoodi­enne, Sean Tillmann a aussi écrit des chansons pour Jennifer Lopez et Kelly Osbourne, et joué dans quelques films ( Starsky et Hutch, Bliss…). Sa vie est un film, quoi. Un film avec Patrick Swayze ou Tom Cruise, et des gens coiffés comme des caniches avec des vêtements trop larges en haut et trop courts en bas. Les années 80, quoi. Le temps a fait son oeuvre. Et c’est aujourd’hui avec tendresse qu’on repense à tous ces trucs affreux.

Et c’est très sincèremen­t qu’on aime Best Summer Ever, le sixième album d’Har Mar Superstar largement dédié aux mélodies baveuses, aux saxos geignards et à la pop synthétoc des années 80 (avec quelques escapades garage lo-fi). “J’ai grandi avec les BO de Dirty Dancing, Cocktail et des chanteurs comme Eddie Money ou Billy Ocean, toute cette super pop de ces années-là.” Une passion coupable (ou pas) qu’il partage avec son pote Julian Casablanca­s, qui l’a signé sur son label, lui a écrit une chanson et a travaillé sur la production de l’album.

Au-delà de la notion de bon goût, Best Summer Ever rappelle un peu la discograph­ie du groupe Ween, toujours sur le fil entre premier et second degré, entre performanc­e et dérision. “J’aime vraiment mes disques, mais je pense que c’est sur scène que je donne le meilleur, que tout se met en place. Ce que je fais est assez difficile à décrire sans m’avoir vu sur scène. Il y a bien sûr des gens qui ne comprennen­t pas ce que je fais, mais je ne leur en veux pas, moimême je ne suis pas sûr de me comprendre complèteme­nt.” Stéphane Deschamps album Best Summer Ever (Cult Records/Differ-ant) concert le 9 juin à Orléans, le 11 à Clermont-Ferrand harmarsupe­rstar.com

“ce que je fais est assez difficile à décrire sans m’avoir vu sur scène”

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