De Franck Gastambide
Les Kaïra
avec Medi Sadoun, Franck Gastambide, Jib Pocthier (Fr., 2012, 1 h 38)
Les Kaïra de Franck Gastambide mérite une attention toute particulière. Il y a un nain qui dit plein de gros mots. Et dans tous les films qui comptent un nain, une personne de petite taille, il y a une bonne raison d’écouter mieux et de voir mieux. On ne parle jamais aux nains, on ne fait jamais attention à eux, on détourne les yeux. Herzog, Delannoy et Vigo l’avaient compris. Le nain est un roi, pas un bouffon, un vrai médium, il sait mieux que les autres ce que vaut la race humaine. Et quand la femme-sanglier lui offre un torrent de cyprine en plein visage, il est celui qui vit l’instant X. Il a l’origine du monde sur le bout de la langue et la jouissance de cette femme en est la preuve ; même si le jouisseur est le véritable maître, le nain profite à lui seul de son asservissement, il devient l’homme-fontaine, seul détenteur du pouvoir d’inondation, et ce torrent qui le submerge irradie la scène d’anthologie qui suit.
Une autre séquence en voiture. Le petit homme ne veut pas que ce soit de la pisse, les autres si, ce serait plus simple. Il ne se résout pas à cette simple évacuation d’eau sale, il sait qu’il s’agit d’autre chose et que tout ce qui provient du désir se doit d’être pur. Il est l’antithèse du lilliputien de Freaks mais la face opposée d’une même médaille. Et de chaque côté, les deux cons magnifiques qui l’encadrent noient de leur bêtise la tête dodelinante du petit homme. On peut rire de tout, on ne le répétera jamais assez. Surtout lorsque c’est méchant et injuste. Mais pas avec tout le monde. Avec moi, ils peuvent, je suis aussi né à Melun. G. N.