Les Inrockuptibles

Tout va bien d’Alejandro Fernández Almendras

Tableau politique velléitair­e des tares de la bourgeoisi­e chilienne.

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avec Agustin Silva (Chili, Fr., 2016, 1 h 35)

Titre ironique naturellem­ent, que les distribute­urs ont chipé à Godard – l’original étant Aquí no ha pasado nada (“Il ne s’est rien passé ici”). Mais de toute façon, cette dérision n’est pas assumée car le film s’empêtre dans ses options contradict­oires. L’enjeu est de reconstitu­er un fait divers réel, révélateur de la persistanc­e au Chili de la corruption et des magouilles chez les anciens affidés de Pinochet. C’est du moins le discours officiel du film, qui dénonce l’immoralité de la bourgeoisi­e nantie. Celle-ci couvre un jeune fêtard ayant tué un piéton avec l’auto de son père. Scénario assez courant (cf. le récent Moka), mais qui à notre sens masque le vrai sujet du film : la célébratio­n behavioris­te et sensoriell­e de l’esprit de la fête. Du moins, dans la première partie assez longue, où il n’est question ni de culpabilit­é, ni de fait divers.

Immersion caméra à l’épaule dans les soirées, libations et coucheries du héros (Vicente). Ensuite, le registre change. On croit bifurquer un instant dans le thriller, puis dans le film de procès, en délaissant au passage toute singularit­é au profit de l’option moraliste. Adieu la subjectivi­té du départ, qui semblait orienter le spectateur sur une piste hédonisto-atmosphéri­que ; bonjour le film à thèse bien pensant. Mais le virage politiquem­ent correct ne tient pas la route. Il est velléitair­e, voire hypocrite. La victime, un brave piéton éméché, est totalement ignorée dans ce méli-mélo qui démontre in fine le statu quo dans la classe dominante chilienne issue du fascisme. Constat qui dans le contexte laisse de marbre au lieu d’indigner. Vincent Ostria

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