Aquarius de Kleber Mendonca Filho
Une sexagénaire vit seule dans un immeuble d’où voudraient la chasser des financiers. Le portrait superbe d’une femme tenace.
Aquarius, deuxième long métrage de Kleber Mendoça Filho, après Les Bruits de Recife, comporte dans ses premières vingt minutes l’un des plus beaux coups de cinéma (comme on dit coup de théâtre) vus cette année. Les premières séquences nous installent dans la chronique nostalgique et rétro d’une famille de riches intellectuels de Recife, réunis pour fêter les 70 ans de la toujours très belle tante Lucia. La jeune génération de trentenaires s’éclipse pour aller écouter du rock sur la plage – Another One Bites the Dust de Queen, entendu aussi cette année dans Everybody Wants Some!! de Richard Linklater, autre reconstitution pétulante de l’année 1980, à laquelle ces premières scènes d’Aquarius font un peu penser.
Le film séduit d’emblée par sa narration down tempo, une sorte de nonchalance travaillée dans le rythme, qui nous installe en douceur parmi ses personnages : Clara, très belle femme de 30 ans coiffée à la garçonne, son frère et son mari, qui tous deux portent avantageusement la même moustache que Freddie Mercury, ses trois enfants, dont le dernier vient de naître. L’immense appartement de tante Lucia ouvre sur la baie de Recife, la lumière du soir est belle, l’heure est à la fête. Tante Lucia fait un émouvant discours, le mari de Clara étreint l’assistance en évoquant le combat de son épouse contre un cancer du sein qu’elle vient de vaincre. L’été semble sans fin, la jeunesse et l’ivresse dureront toujours, les convives hurlent à s’époumoner l’entêtant refrain de Todo menina baiana de Gilberto Gil.
Mais lentement un fondu enchaîné les dissout. L’appartement est vide, le même tube de Gilberto Gil passe en sourdine sur la même platine vinyle. Est-ce le lendemain de la fête ? Une très belle sexagénaire brune entre dans le champ. Mais ce n’est