Les Inrockuptibles

Magic circus

Avec assemblage de numéros créé à Hambourg et scénograph­ié par Philippe Quesne, le cirque se fait performanc­e.

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IThe Greatest Show on Earth, l faut un rien d’insolence – ou pas mal d’inconscien­ce – pour oser The Greatest Show on Earth. Soit un carrousel de performeur­s réunis par la paire Anna Wagner et Eike Wittrock le temps d’un spectacle à géométrie variable. A l’image de son monsieur Loyal improvisé, l’Américain Jeremy Wade : qu’il apparaisse dans un costume “étron” du plus bel effet (comique) ou en prédicateu­r lançant des “We are sorry, really sorry”, Wade fait le job avec ce petit plus ironique. Tous ne s’en sortent pas aussi bien : on pense au cabaret porno-kitsch du duo Florentina Holzinger et Vincent Riebeek, dont le numéro de trapèze s’enferre dans une histoire d’inceste décousue. On leur préfère sans mal Leo et Lilly, chat et chien un rien désabusés quant à leur condition animale.

Le plus beau dans ce show plus grand que nature réside souvent dans le presque rien, magnifié ici par Antonia Baehr et Valérie Castan : elles signent des passages furtifs, l’un de dressage sans cheval et l’autre d’acrobatie sans virtuosité. Avec la grâce irréelle d’Emmilou Rössling, sous le nom de scène de La Fortunada, cette triplette fait des étincelles. On touche alors au cirque et à sa mythologie faite de dynasties familiales et de nostalgie. Et que dire des Japonais multitâche­s de Contact Gonzo, qui osent la paire de claques façon clown du XXIe siècle et réinventen­t l’homme-canon – ici, un lancer de projectile­s sous forme de légumes. Devant leur folie douce et quelques ecchymoses en prime, on reste bouche bée.Ce cirque à papa est d’une jouissance coupable. Meg Stuart et Eisa Jocson complètent le tableau mais sans pouvoir rivaliser avec ces kamikazes de première.

On voit bien l’idée initiale de cette création dévoilée cet été à Hambourg : casser les codes de représenta­tion du cirque tout en gardant l’esprit de la piste. The Greatest Show on Earth est enfin un bel objet avec sa scénograph­ie due à Philippe Quesne et sa bande-son en live du groupe Les Trucs, parfaits de modernité décalée. De quoi transforme­r l’or en piste aux étoiles. Ou l’inverse. Philippe Noisette

The Greatest Show on Earth dramaturgi­e Anna Wagner et Eike Wittrock, scénograph­ie Philippe Quesne, du 30 septembre au 5 octobre au Théâtre Nanterre-Amandiers

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