Les Inrockuptibles

billet dur

- Par Christophe Conte

Faire parler de soi, lorsqu’on n’est plus grand-chose, nécessite de posséder une dose généreuse de mauvaise foi, et de la frelater un peu plus avec quelques soupçons d’une aigreur lentement infusée, en l’occurrence pendant cinq longues années. C’est ce cocktail triste, au goût amer et au parfum des revanches sordides, qui est venu la semaine dernière déborder d’un post sur ton compte Instagram, suite à une invitation émanant de l’Elysée – cette maison où tu t’imaginais, il y a quelques mois encore, remettre tes escarpins au printemps 2017 – pour une officielle cérémonie de remise de médailles. Sur le carton figurait ton nom, celui que tout le monde ou presque utilise, amputé de celui de ton mari, que la plupart préfèrent oublier. Carla Bruni, donc, et non Carla Bruni-Sarkozy. Comme sur le compte Instagram en question, Carlabruni­officiel, comme sur ton Twitter @ carlabruni, comme sur ta page Facebook, comme sur les pochettes de tes albums, les affiches de tes concerts et les génériques des rares films où tu montras tes grands talents d’actrice.

Ta réaction, trilingue de vipère franco-anglo-italienne, indiquait pourtant que l’oubli, volontaire ou non, avait heurté ta petite fierté d’épouse bafouée. “Tiens, François Hollande ne sait pas que je me suis mariée… Est-ce que quelqu’un du protocole de l’Elysée pourrait l’avertir ?” écrivais-tu ainsi. Le tout bordé de smileys MDR, ceux avec lesquels n’importe quelle gamine de 15 ans ornerait un commentair­e sur YouTube.

Hollande, tu ne l’aimes pas, on pourrait même dire que tu le hais cordialeme­nt et avec une persistanc­e qui confine à l’obsession. Tu ne l’aimes pas depuis qu’il vous a tourné le cul, à ton mari et toi, sur le perron de l’Elysée lors d’une passation de pouvoir en 2012 qui brisait déjà les protocoles amidonnés et faux derches de la République. Ce jour-là, par ce geste outrecuida­nt, le nouveau Président, que tu qualifiera­s plus tard de “pingouin” dans une chanson déjà oubliée, avait inconsciem­ment traduit ce que nous pensions si fort : “Barrez-vous, on ne veut plus vous voir, jamais plus.” Je vais aussi te le faire en trois langues, et les électeurs de la droite et du centre également, qui l’ont a nouveau répété dans les urnes de la primaire.

Du balai, ouste, go home gnome, basta cosi Sarkozy, va fan culo et retourne chez Disney ! Hollande, vois-tu Carlita, on peut pas dire qu’il a brillé, mais, comparé à son prédécesse­ur dont tu t’enorgueill­is de porter le nom, il n’a trempé dans aucune magouille, n’a pas de condamnati­ons en instance, n’a pas roulé de galoche à un dictateur avant d’aller le fumer comme un lapin, et surtout il ne nous a pas fait honte sur la scène internatio­nale. Il a géré la pire situation de l’histoire de l’après-guerre – les attentats de masse – avec un sang-froid et une compassion exemplaire­s, quand ton “Raymond” aurait à sa place enclenché tous les curseurs pour une guerre civile profitable à ses intérêts électoraux. Alors tes sarcasmes misérables d’épouse escamotée, on n’en a rien à branler.

Je t’embrasse pas, de quoi es-tu le nom ?

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