Les Inrockuptibles

Prise de mots

-

Maroussia Diaz Verbèke jongle avec les mots dans Circus Remix. Un savant travail de collage. Dans une séquence de

Circus Remix, les mots tombent littéralem­ent sur la piste. Une, deux, puis trois lettres composant “mot”. Puis, à l’aide d’une quatrième : “mort”. Maroussia Diaz Verbèke jongle quelques instants avec puis passe à autre chose : soit dix numéros en tout. La fille de l’air qu’est Maroussia peut marcher à l’envers suspendue par les pieds ou disparaîtr­e sous le tapis. On la verra en clown dans un costume piqué à une fête brésilienn­e ou en fantôme. DJ enfin qui pousse le bouchon trop loin. Deux heures plus tard, on n’en revient pas de cet imaginaire ainsi exposé avec ces temps morts et ces fulgurance­s, ces sauts dans le vide et ces drôles d’histoires. Surtout, elle se risque “à attraper les phrases au vol”, collant des bribes de texte selon un savant travail d’échantillo­nnage. De Jacques Derrida à Raymond Devos, sans oublier Françoise Héritier, c’est un bout à bout de pensée et d’esprit. On apprend beaucoup de choses, durant Circus

Remix, sur l’origine du cirque ou sur l’inégalité homme-femme. Pour les plus déphasés dans le public, les “dialogues” ainsi (re)constitués sont projetés sur écran. C’est sans doute la faiblesse de cet opus touffu et passionnan­t. Les mots cannibalis­ent parfois l’action – et le sourire mélancoliq­ue de l’acrobate n’y fait rien. Il n’en reste pas moins que son imaginatio­n prend plus d’une fois le pouvoir. Depuis l’aventure Ivan Mosjoukine et Le Vide, où elle était dans l’ombre de Fragan Gehlker, Maroussia Diaz Verbèke a pris le temps de voyager, filmer, réfléchir. Circus Remix est riche de cette liberté retrouvée. Philippe Noisette

Circus Remix Jusqu’au 26 octobre, Auch (Festival Circa) ; du 14 au 25 novembre, Paris (Centquatre)

Newspapers in French

Newspapers from France