MYTHE MODERNE

Rappeuse, dramaturge et désormais romancière : la jeune Britannique compose avec Ecoute la ville tomber un conte urbain aux réminiscences antiques. Le roman choc de la rentrée.

KATE TEMPEST DONNE LE TOURNIS. A 32 ans, cette Londonienne à boucles blondes et rimes qui claquent peut se targuer d’avoir secoué le rap britannique et d’avoir furieusement réveillé la poésie contemporaine du Royaume. Au compteur : deux albums, deux recueils, le prestigieux prix de poésie Ted Hughes et deux pièces de théâtre. Car en plus d’être rappeuse et poétesse, la prodige cockney est aussi dramaturge. Et désormais romancière. A la fin d’Ecoute la ville tomber, son premier roman, elle écrit que les histoires qui en composent la trame sont tirées de sa première pièce, Wasted. Ce n’est pas un hasard, chez Kate Tempest tout est lié : la musique et les mots, la dramaturgie et le flow.

Car le roman s’inscrit aussi dans la continuité de son album Everybody Down (2014). Comme une variation littéraire du slam-opéra composé à l’époque, il reprend les thèmes, les personnages et les intrigues des douze pistes d’hier, étirées aujourd’hui sur 400 pages. On y suit Becky, Harry, Pete ou Leon. Des rejetons du Londres middle class qui se battent pour échapper à l’avenir bétonné que leur promet la mégalopole gentrifiée. Becky rêve de danser mais elle masse des traders, Pete s’imagine en révolutionnaire de gauche mais s’étouffe avec la fumée de sa beuh, Harry et Leon, quant à eux, dealent de la coke en attendant mieux.

Tout est pensé chez Kate Tempest, cohérent.

En chansons, poèmes ou fictions, elle met des mots sur le désarroi de cette génération post-Thatcher, ces millennials qui refusent d’être les victimes sacrificielles de la société de la finance, du consumérisme et d’un cynisme dévorant.

Ecoute la ville tomber est un conte urbain d’aujourd’hui, mais l’épopée de ses héros contemporains, ces “Nouveaux Anciens”, résonne des mythes d’hier. Dès lors, c’est peut-être du côté de la dramaturgie antique qu’il faut aller chercher le canevas de l’oeuvre de Kate Tempest. Cet art qui interrogeait le rapport des hommes à leur destin, à leurs idoles et à leur cité.

En chansons, poèmes ou fictions, elle met des mots sur le désarroi de la génération des millennials