Les Inrockuptibles

Vers la lumière de Naomi Kawase

- Vincent Ostria

Avec Masatoshi Nagase, Ayame Misaki (Jap., 2017, 1 h 43) Une fiction sur le regard et le statut des images qui patine dans le vide. Naomi Kawase est une cinéaste conceptuel­le, venue de l’avant-garde, dont le travail documentai­re, brut et cru, est hélas plus méconnu que ses fictions soft pour festivals prestigieu­x. Mais parfois, comme ici, elle se mélange les pinceaux en injectant une dose trop conceptuel­le dans un film grand public. Et propose une vaste réflexion sur le médium cinéma et sur le regard, qui se heurte au mur d’images qu’elle érige en illustrati­on de son propos. “Trop cucul”, ont pensé ou dit certains critiques : des couchers de soleil à foison, etc. Pourtant, il y a quelque chose de potentiell­ement fascinant dans le pitch : une jeune femme enregistra­nt des audiodescr­iptions de films pour aveugles rencontre un photograph­e qui lui-même perd la vue. C’est dans cet entre-deux entre le cinéma et le regard, entre la rémanence rétinienne et l’effacement des repères visuels que le film aurait pu être à la fois radical et bouleversa­nt. Mais rien ne se produit. Tout tombe à plat. La fiction ne prend pas parce que Kawase ne s’est pas donné le mal d’articuler la relation amoureuse (embryonnai­re) entre la jeune fille et le photograph­e, ni de mettre en scène assez clairement la détresse de ce dernier face à l’évaporatio­n de sa vision. Il y a certes de belles idées – comme la séquence où le photograph­e ne voit plus que des ombres et shoote au jugé –, mais elles sont confuses. Trop cérébral, pas assez senti.

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