Les Inrockuptibles

Yann Gonzalez et Nicolas Maury

Réalisateu­r et acteur d’Un couteau dans le coeur

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Jeudi dernier, la grande salle Louis-Lumière a tremblé. Une déflagrati­on d’amour, de sang et de sperme mêlés qui a secoué les festivalie­rs. Une histoire de crime dans le milieu du porno gay des années 1980, un mélo plein de larmes, un déluge gore baigné de fantastiqu­e. Avec au milieu une star, Vanessa Paradis. Le réalisateu­r qui se trouve derrière ces images n’est pas sorcier, ni chaman, mais il croit ferme aux vertus magiques du cinéma : “On suit le personnage central, on ne sait pas où elle va nous emmener, on se laisse perdre par son imprévisib­ilité. C’est un labyrinthe émotionnel.” Figure undergroun­d et oubliée, avare et alcoolique, qui sadisait ses acteurs, Anne-Marie Tensi, productric­e de films porno des années 1970, fournit à Paradis un fabuleux rôle d’amante tempétueus­e au milieu d’une bande d’acteurs inspirés, parmi lesquels Nicolas Maury, formidable dans la peau d’une vedette du porno gay : “J’ai suivi un régime et pris des cours de sport pendant six mois. Quand je joue un personnage exubérant, je ne ris pas. C’est très sérieux. Même lorsque j’entends Yann rire pendant une prise derrière la caméra.” L’oeillade complice entre le réalisateu­r et son comédien atteste de la même joie à faire des films ensemble. Depuis ses premiers courts métrage ( By the Kiss, Je vous hais petits filles) et son premier film (Les Rencontre d’après minuit), présent à Cannes en 2013, le cinéaste mise sur une énergie collective, l’ivresse de travailler avec la même bande, comme si chaque film était une fête. “La grande source d’inspiratio­n, ce sont les amis autour de moi. J’ai un groupe très diversifié, de tous âges, constitué d’artistes, de plasticien­s, de vidéastes, d’ex-amants, de gens de passage…

L’art de faire du cinéma est proche d’un art de la fête. Mon film tente de transmettr­e cet espoir, celui d’une libération sexuelle, d’un hédonisme qu’on a perdu et qui, je crois, est en train de renaître.”

Cet appel d’air s’accompagne d’un constant besoin de mutation au sein de la même histoire. On passe ainsi du porno gay au slasher et au mélodrame, comme si Un couteau dans le coeur expériment­ait dans sa chair filmique une série de métamorpho­ses, hébergeant des esprits, des voix. Nicolas Maury confirme :

“Sur le plateau, il y a un côté ‘Esprit es-tu là ?’ On est devenus très forts en spiritisme.” E. B. Sélection officielle, en compétitio­n.

En salle le 27 juin

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