Les Inrockuptibles

L’Heure de la sortie de Sébastien Marnier

Avec Laurent Lafitte, Emmanuelle Bercot, Pascal Greggory (Fr., 2019, 1 h 43)

- Bruno Deruisseau

Un prof face à d’étranges élèves, dans un teen-movie qui embrasse l’angoisse de la jeunesse face au chaos contempora­in. On entre dans le film avec fracas : la défenestra­tion, en plein cours, d’un professeur de troisième. Pierre (Laurent Lafitte), un suppléant, , le remplace au pied levé et se retrouve en charge d’une classe d’élite composée de douze surdoués. Cette prise de fonction le confronte à une série de phénomènes étranges. Le plus inquiétant – qui vire à l’obsession chez ce prof – tient dans les réunions secrètes organisées par certains élèves après les cours. Ils s’y livrent à des bizutages dangereux, des sortes de messes mystiques qu’ils filment puis montent avec des found footage apocalypti­ques piochés sur internet (destructio­n de l’écosystème, scènes de boucherie et catastroph­es naturelles). Ils conservent ces montages, qui sont ce que le film a de plus précieux, à l’intérieur d’une boîte noire d’avion enfouie dans une carrière désaffecté­e. La symbolique est claire, cette boîte enregistre la mémoire d’une catastroph­e imminente que Pierre sent venir. Le film ne manque pas de séduire, par ses acteurs, tous impeccable­s, sa BO carpenteri­enne signée Zombie Zombie, son croisement entre

Le Cercle des poètes disparus, Virgin Suicides et Le Village des damnés et son recours à l’angoissant flot d’images d’actualité. Reste que son scénario souffre d’une série de non-dits – la pédophilie du professeur décédé, l’homosexual­ité du remplaçant, l’élitisme BFCB (blancfranç­ais-catho-bourge) de cette classe – lourdement soulignés par la mise en scène. On regrette surtout que le film n’ait, au final, pas grand-chose à dire sur la question – cruciale et de taille – de l’importance d’habiter ou de quitter ce monde chaotique, et se confine en définitive dans un rôle d’artificier.

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