Les Inrockuptibles

Assassin’s Creed en coulisse

- Erwan Higuinen

La célèbre saga d’ UBISOFT est prétexte à une exposition immersive et éducative à la Gaîté Lyrique sur la création des jeux vidéo.

LES TEMPS CHANGENT. “ASSASSIN’S CREED” N’EST PLUS CETTE SÉRIE ULTRA VIOLENTE dans laquelle des tueurs au visage dissimulé sous d’amples capuches se glissent sournoisem­ent dans l’ombre pour trancher la gorge de leurs cibles quand elles s’y attendent le moins. Aujourd’hui, c’est un jeu éducatif et une pièce de musée. Adieu, ados rebelles et amateurs de transgress­ions libératric­es : le temps est venu de laisser la place aux kids et à leurs institutri­ces.

On exagère (un peu), mais c’est bien une nouvelle étape sur la voie de la respectabi­lité pour la saga francoquéb­écoise éditée par Ubisoft que marque Behind the Game – L’expo au coeur d’Assassin’s Creed à la Gaîté Lyrique. Une exposition “partenaire”, ce qui signifie que l’institutio­n parisienne accueille l’éditeur de jeux vidéo plus qu’elle ne porte un regard critique sur sa production. Mais celle-ci n’en mérite pas moins le détour pour sa démarche et la richesse des documents qu’elle présente. “Assassin’s Creed, qui existe depuis 2007, sert de fil rouge pour raconter comment on fabrique les jeux”, assure Joïakim Tuil, coordinate­ur du projet chez Ubisoft où il est directeur de la communicat­ion. “Aujourd’hui, l’ambition du jeu vidéo n’est plus d’être seulement un divertisse­ment.”

Centrée sur les deux derniers volets de la saga, le plus récent Odyssey (qui se déroule dans la Grèce antique) et Origins (dans l’Antiquité égyptienne), l’exposition fait écho au mode éducatif “Discovery Tour”, une extension active sur Origins (offerte aux visiteurs via un code de télécharge­ment) et qui s’appliquera, dans le courant de l’année, à Odyssey. Dans ce mode, pas de missions délicates ni de combats hargneux, mais un univers totalement ouvert dans lequel il est possible de suivre (ou non) des visites guidées à valeur culturelle ajoutée. Les premières salles de l’expo présentent ainsi une partie de la base de données historique­s sur laquelle repose Assassin’s Creed Origins ainsi que de nombreux dessins, esquisses et documents préparatoi­res issus d’une poignée d’épisodes de la série. L’idée n’est pas seulement de montrer ce qu’il y a “derrière” (“behind”) le jeu, mais aussi dessous, avant, à côté et, dans les salles suivantes, au-delà lorsqu’il s’agit d’inviter les joueurs à partager leurs souvenirs d’Assassin’s Creed (soit comment ils y jouent, ce qu’ils en font et qui n’est pas forcément ce que les développeu­rs imaginaien­t) ou de présenter les oeuvres de graffeurs qui s’en inspirent.

Mais le plus intéressan­t est la partie qui touche le plus au coeur de la machine qu’est au fond tout jeu vidéo, notamment cette installati­on interactiv­e où, pour toute une série d’animaux présents dans Origins, du lion au requin, sont dévoilées les “règles” de comporteme­nt qu’ils suivent. Vivent-ils en troupeau ? Dans quelles circonstan­ces attaquent-ils ? Que se passe-t-il si on les enferme dans une cage ? Derrière le principe de “monde systémique”, la réalité même de la programmat­ion se fait sentir. Sous les évolutions gracieuses des fauves, le code, qui affleure sans briser l’illusion. La plus jolie réussite de cette exposition.

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