Les Inrockuptibles

Bonnes vibrations

Avec son premier album, BASILE DI MANSKI mélange pop, hip-hop et r’n’b pour un résultat aussi pointu que sincère.

- Jacques Simonian

ALAIN SOUCHON CHANTAIT AU DÉBUT DU NOUVEAU MILLÉNAIRE : “La vie ne vaut rien/Rien ne vaut la vie.”

Si lui justifiait ses jours sur Terre au nom de l’amour, Basile Di Manski (Basile Szymanski pour l’état civil) s’est rendu compte de l’importance de la sienne quand il a failli la perdre, après qu’un de ses poumons s’est arrêté. Revenu de ce quasi-séjour dans l’autre monde, ce kid de la banlieue parisienne se réveille transformé en un homme nouveau, avec une idée bien précise en tête. Désormais, la musique représente­ra la seule discipline qui rythmera sa vie ; il ne s’assiéra plus jamais sur les bancs de la fac de droit. Après avoir publié deux maxis rafraîchis­sants, In Camera (2016) et Personal Point Break (2018), Basile Di Manski sort son premier album chez Pain Surprises, le label du producteur Jacques.

Des douze titres qui constituen­t ce disque inaugural, exclusivem­ent interprété dans la langue de Shakespear­e (sûrement par souci de pudeur), une sensation de cohérence et d’immédiatet­é s’impose avec insistance, transporta­nt l’auditeur dans un univers parallèle. Concernant le fond : tous les thèmes qu’il aborde traitent ouvertemen­t de sentiments très personnels. Parmi eux, on retrouve son angoisse de sentir le monde sombrer dans un désastre écologique (Before the World) – seul titre produit avec Jacques –, ou encore sa déception de voir les hommes ultraconne­ctés, voire dépendants des machines qui les entourent (Already Cyborgs).

Si cet enfant des années 1990 semble porter le spleen de sa génération, il chante parfois le bonheur, comme sur Without You (White Sand), qui s’organise comme une exquise déclaratio­n d’amour à sa petite amie, “une femme du futur” comme il s’amuse à l’appeler sur ses réseaux.

L’influence des nineties ne se limite pas aux textes, elle se remarque aussi dans son esthétique, grandement façonnée par l’imaginaire californie­n de cette époque. A un point tel que c’est toute l’ambiance sonore de Transworld qui transpire la côte Ouest américaine. On y est d’ailleurs plongé en ouverture avec la paire de morceaux Levitate et 100° F, deux bijoux pop auxquels il faut rajouter une ligne de basse empruntée au hip-hop.

Quand toutes les bonnes vibes du r’n’b sont invoquées pour Without You (White Sand), Basile Di Manski surprend encore en sortant ses synthétise­urs sur Activate Chaman Mode, qui sera plus jouissive en plein été. Au milieu de tout ça, sa voix, à mi-chemin entre celle d’un crooner contempora­in et les narrations plus robotiques qu’offre la musique électroniq­ue, nous guide parfaiteme­nt, et se répond même parfois via des ad-libs très présents (Kelly), nous rappelant les débuts très prometteur­s du juvénile XXYYXX.

S’il n’est pas encore habitué aux grandes salles de concert, Basile Di Manski y a tout de même fraîchemen­t goûté, quand il a assuré, fin mars, la première partie de Therapie Taxi à l’Olympia. Et pouvoir un jour le voir se produire à nouveau là-bas, c’est tout le mal qu’on lui souhaite.

 ??  ??
 ??  ?? Transworld
(Pain Surprises/Bigwax)
Transworld (Pain Surprises/Bigwax)

Newspapers in French

Newspapers from France