Les Inrockuptibles

Etienne Daho

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“Admirateur des images de Pierre et Gilles, que ce soit pour le magazine Façade ou la pochette du 45t Disco Rough (1980) de Mathématiq­ues Modernes produit par Jacno, j’avais décidé qu’ils réaliserai­ent la pochette de mon deuxième album. Par je ne sais quel biais, je les ai donc contactés et ils ont aussitôt accepté ma propositio­n. Comme références visuelles, j’avais en tête les pochettes des trois premiers albums de Ricky Nelson, à savoir un portrait très frontal. C’est d’ailleurs ce que j’avais déjà essayé de faire pour Mythomane (1981), mais en vain (rires) ! Le jour de la séance, je portais ce T-shirt marin qu’ils m’ont demandé de garder puis ils ont décidé de m’asperger d’eau et de poser leur perroquet Bibic sur mon épaule alors que j’ai la trouille des oiseaux… Je me souviens encore du jour où j’ai reçu l’Ekta, l’image était absolument magique ! Au-delà du côté esthétique, Pierre et Gilles avaient réussi à capturer mon âme et à raconter le disque. Autrement dit, un été breton à faire la fête à Dinard, Saint-Malo et Saint-Lunaire dans une atmosphère de candeur et de légèreté. C’est une pochette qui symbolise mes débuts et qui a fait le tour du monde grâce à la notoriété internatio­nale de Pierre et Gilles. En 1995, j’ai retravaill­é avec eux pour illustrer le mini-album avec le groupe anglais Saint Etienne. En clin d’oeil au titre de Reserectio­n et aux rumeurs mortifères à mon égard, j’avais envie de jouer avec l’image de moi lapidé dans les bras de Sarah Cracknell, avec Bob Stanley et Pete Wiggs cachés dans les buissons. Cette image faisait partie d’une série baptisée Les Plaisirs de la forêt. Cette pochette est évidemment moins lumineuse que celle de La Notte, La Notte, mais elle est tout aussi magnifique et puissante. Elle dit beaucoup de ce que je traversais à l’époque. Plus récemment, en 2017, on a fait un troisième tableau à l’initiative de Paris Match pour une couverture. C’était de belles retrouvail­les. Ils ont proposé de me représente­r avec ce masque mortuaire, qui faisait écho à l’été où j’avais failli clamser (sourire). A chaque fois, ils idéalisent leurs personnage­s en quasi divinités. Pierre et Gilles ont une grande sensibilit­é et une énorme culture, qui leur permettent de relier leur sujet à une mythologie ou un moment de l’histoire de l’art. Ils savent créer une image instantané­ment iconique. C’est extrêmemen­t ” rare et cela tient du génie.

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Legend, Madonna (1995)
 ??  ?? Le Mystère de l’amour, Marie France et Marc Almond (1992)
Le Mystère de l’amour, Marie France et Marc Almond (1992)
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Propos recueillis par Franck Vergeade

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