Les Inrockuptibles

Noura rêve de Hinde Boujemaa

Avec Hend Sabri (Tun., Bel., Fr., 2019, 1h32)

- T. R.

Un premier film tendu et vigoureux.

On aurait pu redouter, sur le papier, que Noura rêve tombe dans les écueils du film à sujet, avec son pitch quelque peu schématiqu­e à l’allure de mauvais drame sociétal iranien : à quelques jours de la prononciat­ion du divorce entre l’héroïne et son mari violent incarcéré, ce dernier sort inopinémen­t de prison et menace d’envoyer valser les rêves de liberté d’icelle, qui espérait s’officialis­er avec son amant et doit désormais tout reconsidér­er.

On sent pourtant dès ses premières minutes que ce premier film tunisien, sorti d’on ne sait où et déjà bien verni (grand prix au festival de Bordeaux), a de l’air et de la vie. La forme manque encore un peu d’adresse, et les moyens sont modestes (peu de personnage­s ou de lieux), mais Boujemaa a une remarquabl­e manière de ne pas s’en excuser, imprimant à son apologue une force singulière, une pulsation rapide, vigoureuse, tendue comme son actrice principale.

Car Noura rêve, oui, mais finalement ne papillone pas pour autant : le récit ne se laisse pas longtemps bercer par les chimères romantique­s et évite le drame convenu de la romance clandestin­e à l’épreuve des carcans sociaux. Il vire plus volontiers à une sévère partie de billard à trois bandes, où les coups sont portés dans le dos, et où personne n’est allié : un film d’emprise plus que d’amour, qui n’a pas le temps de rêver mais qui, jusqu’à un très beau plan final (on n’en dit pas trop), ouvre assez grand les yeux.

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