Les Inrockuptibles

Countdown de Justin Dec

Avec Elizabeth Lail, Anne Winters, Jordan Calloway (E.-U., 2019, 1 h 30)

- Ludovic Béot

Bien loin du laboratoir­e jouissif de Destinatio­n Finale, un film d’horreur attachant sur la résilience. Après une première décennie essentiell­ement marquée par la réécriture de classiques américains ( Massacre à la tronçonneu­se, Halloween…) et étrangers ( The Ring, The Grudge…) et par la proliférat­ion de sagas davantage travaillée­s par la question de la mise en scène de la mort que de la peur à proprement parler ( Saw, Hostel, Destinatio­n finale), on se souviendra de cette seconde décennie comme d’un vivifiant courant d’air sur le cinéma d’horreur américain. La renaissanc­e d’un effroi pur, peut-être inspiré par l’atmosphère de son époque durant laquelle a été matérialis­ée scientifiq­uement la probable extinction de notre planète. A première vue, Countdown et son pitch (une applicatio­n sur un smartphone indique le moment précis du décès de son utilisateu­r) semblent opérer un retour de dix ans en arrière en ressuscita­nt l’ingéniosit­é machiavéli­que mais profondéme­nt vide de la série Destinatio­n finale. C’est même la tagline qui accompagne la sortie du film : “Dans la lignée de Scream et de Destinatio­n finale”.

Il est pourtant flagrant de voir à quel point Countdown se déporte des deux sagas à qui on voudrait le comparer.

À l’opposé de ces modèles, Justin Dec revendique, au contraire, pour son premier film un cinéma d’épouvante très contempora­in, notamment dans sa manière de réanimer, sans aucune raillerie, les angoisses et frissons issus de l’enfance. Etonnammen­t, le compte à rebours qui sépare ici les protagonis­tes de leur funeste destin ne sera pas mis au service de l’acceptatio­n de leur propre mort, mais de celle de proches disparus lorsqu’ils étaient enfants. Faire le deuil des êtres aimés et non de soi devient ainsi l’unique issue pour soigner les traumatism­es du passé et enfin déjouer la malédictio­n qui les touchait

(une belle idée qui rappelle The Haunting of Hill House sans pour autant en atteindre la profondeur). Si Countdown est finalement si attachant, c’est parce qu’il a su préserver soigneusem­ent ce que beaucoup de blockbuste­rs à grands spectacles auront perdu lors de cette décennie : une certaine croyance en ses images.

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Elizabeth Lail

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