Les Inrockuptibles

Underwater de William Eubank

Un survival movie subaquatiq­ue placé sous l’influence de James Cameron. Avec moins d’ampleur mais une certaine efficacité dramatique.

- Théo Ribeton

UNE BOÎTE DE CONSERVE PERDUE DANS LE NÉANT retient à son bord une petite piraterie faite de mécanos et de scientifiq­ues, vieux de la vieille à joli look post-indus, combi technique dézippée et taches de cambouis sur peau humide (ah… et aussi, il y a toujours ce type en chemise hawaïenne), dans un labyrinthe de tuyaux vétustes dont ils devront s’extirper non sans déplorer quelques morts en chemin. On connaît la chanson, et surtout le modèle : James Cameron, auquel cet Underwater propose un vibrant hommage puisqu’il en remake à peu près tous les films à la fois.

D’abord Abyss, puisque ledit néant est une fosse océanique de haute profondeur, et la boîte de conserve, une station de forage subaquatiq­ue (qui s’effondre et menace ses occupants d’une mort imminente : ils doivent s’en échapper à tout prix). Aliens aussi, lorsque de vilaines bestioles qu’il ne fallait pas réveiller s’ajoutent à l’équation en cherchant des noises à l’équipage. Et peut-être même Les Fantômes du Titanic, exploratio­n documentai­re de l’épave, dont on retrouve le décor d’épouvante, avec ses ruines aquatiques enténébrée­s et ses poussières jaunes suspendues.

Underwater est le film d’une idée simple : un survival de rando au fond de l’océan. “Est-ce que quelqu’un l’a déjà fait ?”, s’inquiète la petite scientifiq­ue timorée, la première fois qu’est proposé le plan (enfiler des scaphandre­s résistants aux hautes pressions et marcher quelques kilomètres jusqu’au site le plus proche). Elle parle de la rando, bien sûr ; mais sans doute aussi du film, qui n’a pas vraiment d’autre justificat­ion que d’exploiter cette situation inédite, probableme­nt pas avare de possibilit­és.

Or ces possibilit­és s’avèrent relever du challenge, dans ce décor où l’on ne voit goutte et où l’opportunit­é d’un grand film requiert une solide aisance dans l’abstrait : rien de connu ne vit et, quelque part, la plus grande source de terreur disponible pour le film était sûrement de faire corps avec ce vide mortifère pour en évoquer un autre (celui de l’espace) – un endroit où l’homme n’a pas de présence naturelle, se trouve cerné par une mort invisible, instantané­e, sans prédateur, contenue dans la matière même. Underwater a un peu trop peur de l’épure pour se satisfaire de ces seuls éléments : il se sécurise, mais se perd aussi un peu en dégainant quelques monstres fort convenus, et beaucoup trop de jump scares. L’espoir entrevu d’une petite pépite froide et noire passe ; la friandise cameronesq­ue demeure.

Underwater de William Eubank, avec Kristen Stewart, T. J. Miller (E.-U., 2019, 1 h 35)

Lire notre entretien avec Kristen Stewart p. 10

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