Tu seras un homme papa

Par l’autofiction, Gaël Leiblang trouve la distance juste pour raconter la perte d’un enfant. Roman est né le 24 mai 2014 à 19 h 28. Il est placé en couveuse et comme beaucoup de prématuré·es, il ressemble à “une petite crevette rose”. Très vite, on lui découvre une malformation de l’oesophage. Une première opération est programmée. Le refrain réconfortant (“Ça va aller, ça va bien se passer”) des proches et des soignant·es apaise un peu les angoisses du couple. Mais les choses empirent et le diagnostic est annoncé. Roman souffre d’une maladie génétique rare et très grave. En treize jours, le couple perd son enfant. Cette histoire tragique est celle de Gaël Leiblang. En 2018, ce journaliste sportif, producteur et réalisateur en fait la matière d’un seul en scène, aujourd’hui adapté en podcast. Dans cette autofiction, les mots de Leiblang sont cette fois-ci pris en charge par plusieurs comédiens qui se partagent les rôles. Le récit est guidé par le monologue du père, qui nous fait revivre ces jours d’incertitude. La cadence, la précision et la distance avec lesquelles les étapes de ce basculement tragique sont exposées, empêchent le témoignage de tomber dans une intimité trop grande pour être partageable. Et si le partage a lieu, c’est grâce à la fluidité de la narration et à une idée toute simple qui consiste à envisager le traumatisme sous le prisme du sport. En off, des archives de combats mythiques, qui sont pour le narrateur comme de vieux fétiches adorés (“Mohamed Ali contre Joe Frazier, octobre 1975”), viennent entrecouper la douleur et transcender la peine.

Tu seras un homme papa de Gaël Leiblang. Sur arteradio.com et les plateformes d’écoute