Les Inrockuptibles

Rodolphe Burger

Environs Dernière Bande/PIAS

- Franck Vergeade

Entre reprises disparates et maîtrise mélodique, le natif de Colmar convoque amis et fantômes sur un huitième album poétique et voyageur.

LA POCHETTE DU HUITIÈME ALBUM DE RODOLPHE BURGER représente une carte des environs de Colmar, trouvée aux puces de Clignancou­rt et offerte par son ami Fred Poulet, à la fois chanteur, musicien et réalisateu­r. Un double cadeau pour l’ex-leader de Kat Onoma, né dans la préfecture du Haut-Rhin en 1957 et dont la topographi­e irrigue largement son oeuvre jusqu’à son dépaysant festival, C’est dans la vallée, à Sainte-Marie-auxMines.

Dans ce disque inspiré par sa géographie intime, l’Alsacien mélange dix morceaux originaux avec quatre reprises disparates (Can, Sam Cooke, Grant Lee Buffalo, The Jamaicans), qui résument assez bien sa largesse d’esprit et sa curiosité artistique.

Amorcé par le single Bleu bac typique du parlé-chanté de Rodolphe Burger, qui signe avec la poétesse Myriam Boisaubert un texte pas piqué des hannetons (“J’ai vu le jambon du cochon / Qui a mangé les glands / Dans la bibliothèq­ue du Vatican”), cet album défile dans une ambiance en clair-obscur, comme dans un film labyrinthi­que peuplé de fantômes noctambule­s, dont Christophe serait la présence vocale la plus chavirante sur le morceau conclusif, La Chambre. Entre une Valse hésitation haletante et Le Chant des pistes bien nommé, Rodolphe Burger continue de dessiner

des paysages sonores aux Environs de la chanson lettrée, du rock psychédéli­que et de l’électroniq­ue contemplat­ive.

Pour reprendre un titre dont il est à la fois auteur et compositeu­r, Le Chant des pistes résume bien la trajectoir­e de Rodolphe Burger dans le paysage hexagonal qui, depuis toutes ces années, s’entoure d’une grande famille musicale, dont une partie figure au générique d’Environs : la contrebass­iste Sarah Murcia, les batteurs Arnaud Dieterlen (Bashung) et Christophe Calpini. Ici ou là, on retrouve la voix familière et impériale de Bertrand Belin (Les Danses anglaises), suivie de quelques adaptation­s ingénieuse­s de Schubert (Gute Nacht, Leiermann) ou Shakespear­e (WhatYou Will).

Avant que le regretté Christophe ne vienne hanter La Chambre, un single tiré de Far from the Pictures (1995) de Kat Onoma et dont les paroles résonnent étrangemen­t en ces temps toujours endeuillés par l’absence du “beau bizarre” de la chanson française : “Et après le débat comme dit Casanova / Fronçant les sourcils vous diriez /C’est bizarre.”

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