Hugo Lindenberg
Un jour ce sera vide (Christian Bourgois), 250 p., 16,50 €
Ce premier roman retourne à l’enfance désolée d’un garçon de 10 ans. Si loin, si proche, et somptueusement écrit.
Bien qu’il y ait au moins un d’un autre garçon de la plage, précédent fameux, le récit Baptiste, ange de visibilité dont la de l’enfance n’est pas forcément vie est une cérémonie dans le plus un bon point de départ pour un innocent de ses gestes. “Quand premier roman. Hugo Lindenberg Baptiste se lavait les dents ou laçait en conviendrait probablement, ses chaussures, il le faisait avec la tant on soupçonne à le lire qu’il grâce de ceux qui se savent observés ne doit pas se coucher de bonne et qu’on a délivrés de leurs monstres.” heure et doit même être du genre Des monstres qui sont si prégnants à ne pas fermer l’oeil de la nuit. dans la vie du narrateur qu’ils Si l’exercice du retour à l’enfance occupent la majeure partie de son est ô combien réussi dans Un jour récit : quatre-vingt-huit pages dont ce sera vide, c’est que l’auteur ne l’intensité culmine dans le compte profite d’un rétrécissement à l’âge rendu détaillé du massacre d’une de ses 10 ans que pour mieux colonie de fourmis. “Pour qu’elles s’ouvrir sur des ampleurs qui, comprennent à qui elles avaient tel un contrepoison au titre, n’ont affaire.” Ce qui n’est pas le cas des rien à voir avec le vide. autres, tous les autres, le grand Un présent au passé composé, Autre, dont l’altérité sans cesse une vacance sur la côte normande. le percute, pire qu’aux autos Le narrateur s’échine à passer tamponneuses. Certes, la grandinaperçu. Ce qui n’est pas le cas mère est gentille, mais un rien gênante avec son accent prononcé. Bien sûr, la tante est “absolument incontournable aux yeux des vacanciers” dans son maillot de bain d’un vert insultant, mais sujette à des déflagrations de folie à péter les assiettes. Fatalement, la mère de Baptiste est jolie puisque son fils est beau, mais inatteignable par sa perfection même. Les monstres de l’enfant Lindenberg sont comme un papillon de nuit qui se cogne aux vitres d’un monde perpétuellement à venir et, partant, inaccessible. N’était ce roman, beau, fulgurant, bénéfiquement écrit, qui sort des égarements dans le réel, dissipe l’obscurité des faits, leur promiscuité, leur étouffement. Souffle alors le grand vent de la littérature : appel d’air, appel de fiction.