Les Inrockuptibles

Geoff Dyer

Ici pour aller ailleurs (Editions du Sous-Sol), traduit de l’anglais par Pierre Demarty, 224 pages, 21 €

- Y. P.

Un anti-récit de voyage déjanté qui donne envie de fuir plus que la Terre ne le permet.

S’il a pour objet les séjours, excursions de son auteur aux quatre coins du globe, Ici pour aller ailleurs est une sorte d’anti-récit de voyage. Car le Britanniqu­e Geoff Dyer déteste voyager. Il met à nu ces angoisses, mesquineri­es, clichés qu’on a tous·tes expériment­és à l’étranger. Qu’il se retrouve devant la Cité interdite, la tombe de Gauguin ou le désert du Nouveau-Mexique, ces textes sont surtout l’occasion d’une plongée en soi sincère, émouvante.

Il y a l’ennui qu’il ressent face à la laideur de Pékin, jusqu’à ce qu’il rencontre sa guide et en tombe raide dingue. Il y a son malaise lorsqu’il se met dans la peau de Gauguin en Polynésie et se confronte au regard torve du peintre sur les femmes des îles. Il y a cette attaque cérébrale qui le surprend un beau jour, tandis qu’il sort les poubelles. Il décrit avec minutie, humour ce médecin qui traque le mal, “comme s’il s’agissait de Ben Laden terré dans les cavernes de Bora Bora”. Pas étonnant qu’Emmanuel Carrère dise de lui qu’il est “l’un des écrivains (…) les plus addictifs qui soient”. Dans un autre style, plus proche de l’essai, Dyer suit le même désir que l’auteur de Yoga : ne pas mentir. Surtout sur soi.

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