Les Inrockuptibles

ALIVE 1997 2001 ALIVE 2007 2007

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A dix ans d’écart, ces deux albums live permettent de mesurer le chemin parcouru, des débuts inspirés par l’énergie des raves à la maîtrise absolue de leur art. Publié quelques mois après Discovery, Alive 1997 a su remettre dans le droit chemin les fans que la mutation pop et mélodique du deuxième album avait pu déboussole­r. Enregistré­e un soir de novembre 1997 à Birmingham, en Angleterre, cette prestation constitue en effet un document précieux des débuts prodigieux du groupe, quand il était encore porté par l’énergie des raves. Lors de cette première tournée, simplement nommée Daftendire­ktour, le duo a choisi de faire comme à la maison, emmenant une partie de son home studio (séquenceur, boîtes à rythmes, etc.) pour plus de simplicité et d’automatism­es. Cela ne signifie pas que cet Alive 1997 soit un décalque d’Homework, bien au contraire. On y entend Daft Punk prendre le risque de se réinventer, quitte à faire des “pains”. Thomas Bangalter et Guy-Manuel de HomemChris­to semblent éprouver un plaisir énorme à bousculer à coups de beats et d’infrabasse­s leur répertoire naissant, le déconstrui­sant en direct afin de le transforme­r en un ensemble compact (une plage unique de 45 minutes !) et rentre-dedans. Ainsi, les Daft frottent Da Funk et Rollin’ & Scratchin’ l’un contre l’autre pour produire encore plus d’étincelles ; créent avec leurs machines de sauvages feux de joie. Abrasif et rugueux, ce live les montre déjà en possession d’un savoir-faire rare pour des artistes techno – leur compatriot­e Vitalic sera un de leurs émules les plus convaincan­ts –, jouant avec le public comme un chat avec une souris. Au bout d’une demi-heure haletante, la transe paraît en effet en redescente. Fausse piste : la suite, avec Alive en guise de finale, terminera d’achever les danseur·euses. Six ans plus tard, Alive 2007 est un document livré à chaud d’un périple mondial alors en cours – il reste quelques dates en Asie et en Australie. Comme une décennie sépare les deux tournées, la technologi­e a énormément évolué. Jouant au sommet d’une pyramide bourrée de machines et de synthés, Daft Punk dispose désormais d’un matériel à la hauteur de son imaginatio­n débordante. Ils viennent d’adopter le logiciel live de la firme Ableton, un séquenceur parfait pour les concerts, qui leur permet de laisser libre cours à leur spontanéit­é. L’esprit iconoclast­e déjà présent sur Alive 1997 s’exprime ici dans les grandes largeurs. Et aucun de leurs morceaux, qu’ils soient extraits de Homework, Discovery ou Human after All, n’en sort intact. Face à la foule en délire du palais omnisports de Paris-Bercy, Thomas et Guy-Manuel découpent en direct leurs compositio­ns, n’en gardant que la chair et les stimuli les plus excitants. La voix chuintante de Steam Machine s’infiltre dans Around the World, la techno lourde de Television Rules the Nation, après un bout de vocodeur d’Around the World, est jumelée avec la house funky de Crescendol­ls, l’euphorisan­t One More Time avec la voix du regretté Romanthony se trouve envahi par le solo électrisan­t d’Aerodynami­c, etc. Pot-pourri diabolique conçu avec une extrême finesse, concentré d’énergie pure, Alive 2007 reste l’un des meilleurs moyens pour oublier que Daft Punk ne donnera plus aucun concert. Vincent Brunner

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