LUIGI LUCHENI, L’ANARCHISTE QUI TUA SISSI – MÉMOIRES de Luigi Lucheni
Dans son autobiographie, l’assassin de Sissi se dresse contre la société bourgeoise de la fin du XIXe siècle.
Le 10 septembre 1898, à Genève, l’impératrice Élisabeth d’Autriche, dite Sissi, est poignardée à mort. Condamné à la prison à vie par une justice suisse qui ne pratiquait pas la peine de mort, son assassin, Luigi Lucheni, mit à profit sa détention pour rédiger des mémoires, jusqu’à son suicide en 1910, à 37 ans. De ces écrits, seul demeure un premier cahier qui s’ouvre par une apostrophe au·à la lecteur·trice en forme d’attaque : “Je t’offre ici l’histoire de ma vie. Je ne doute pas que, vu son originalité, sa lecture t’inclinera à n’y voir que des mensonges.”
Il y a du Dickens dans cette autobiographie de la détresse où Lucheni élargit la description de son cas (de 8 à 14 ans, il est placé chez un “éleveur” sadique) au sort général réservé aux enfants pauvres à la fin du XIXe siècle. Voici “comment s’altère la nature humaine”
et comment l’on devient criminel. S’il a tué, c’est pour “venger sa vie”. Son crime est telle une créance présentée à une société coupable de “graves fautes” à son égard. Mais ce qui le venge, c’est surtout son texte, véritable rage incantatoire contre les juges, avocats, chroniqueurs judiciaires et “les philanthropes des sociétés très chrétiennes”, qui voulaient le réduire à la folie ou à la monstruosité. Rabaissant tous ses détracteurs avec un humour noir qui est son arme favorite, il écrit :
“Ce n’est pas un stupide qui a assassiné l’infortunée impératrice !”, et parlant de sa vie en prison, explique : “Seul le rire, mais un rire qui me force à étayer mes côtes, m’occupe au moins quatre heures par jour. Ce qui l’occasionne ? Les méditations que je fais sur les habitants de ta planète, ô lecteur, et les culbutes qu’ils font pour pouvoir arriver à TABLE…”
Luigi Lucheni, l’anarchiste qui tua Sissi – Mémoires de Luigi Lucheni (Inculte/La petite littérature française), 176 p., 6,90 €. En librairie