LOULOUTE d’Hubert Viel
Un voyage dans le temps comme prétexte au récit d’une enfance rurale dans les années 1980.
Il y a, au début de Louloute, une merveilleuse et émouvante illusion de cinéma. Louise, professeure de français, vient de retrouver son amour de jeunesse, prof tout juste débarqué dans son collège. À la fin de la journée, les deux rentrent ensemble en voiture. Le paysage défile par la fenêtre, et Louise évoque ses souvenirs d’enfance qui finissent par “apparaître” sous ses yeux. Après Artémis, coeur d’artichaut et Les Filles au Moyen Âge, le troisième film d’Hubert Viel, plus limpide, moins ouvert aux petites extravagances poétiques que ses prédécesseurs, est à nouveau une histoire de voyage et de saut dans le temps. Cette fois-ci, l’épopée prend la forme d’un retour sur les terres de l’enfance, celles des années 1980 et de la campagne normande dans laquelle Louloute grandit.
Le regard en arrière s’accompagne ici d’une forme d’idéal, d’enchantement par lequel ce monde d’avant se visite avec les yeux émerveillés des fétichistes en manque de madeleines. Au milieu d’un florilège de couleurs, de pulls à motifs, de tapisseries, de dessins animés et de livres de la Bibliothèque rose, le cinéaste organise le quotidien d’une famille, avec sa tendresse et ses contrariétés.
À ce cadre doux, il adjoint la dégringolade financière du père, producteur de lait écrasé par la suprématie naissante des hypermarchés. Louloute est le récit d’une perte, le conte d’une désillusion, celle d’une enfant et celle d’un monde agricole bientôt broyé par le grand capital.
Il est aussi le portrait mélancolique d’une rêveuse qui ne parvient pas vraiment à s’arracher de cet eldorado qu’est l’âge tendre mais qui finit, dans un dernier évanouissement, par retrouver l’apaisement, réconfortée par les choix que les souvenirs lui offrent pour composer son histoire.
Louloute d’Hubert Viel, avec Laure Calamy, Alice Henri (Fr., 2021, 1 h 28). En salle le 18 août