Les Inrockuptibles

LA FILLE QU’ON APPELLE de Tanguy Viel

L’auteur explore les questions de consenteme­nt et d’emprise dans un texte virtuose, tendu comme un polar.

- Sylvie Tanette

Il est toujours question de lutte des classes chez Tanguy Viel. De personnage­s malmenés qui réclament leurs droits, qui ont cru accéder à des sommets et un jour se ramassent, découvrant que le combat était perdu d’avance. Et ces individus ont tous en commun de bousculer une confortabl­e routine. Ici, Laura, 20 ans, revenue depuis peu dans sa petite ville natale, dépose plainte contre monsieur le maire. Elle l’accuse d’avoir abusé d’elle alors qu’elle était en recherche d’un logement. Comme toujours chez l’auteur d’Article 353 du code pénal (Les Éditions de Minuit, 2017), ce texte extrêmemen­t bien ficelé est construit comme un polar où les ressorts de l’intrigue se dévoilent peu à peu. Viel se place sur un terrain très littéraire, travaillan­t l’oralité comme une matière, les phrases de Laura se heurtant à celles des jeunes policiers qui l’interrogen­t, alors que dans une autre tonalité un narrateur observe, raconte, exhume le passé. Il y a surtout quelque chose d’assez inédit chez cette fille qui explique à deux jeunes hommes incrédules ce que c’est d’être une fille, d’être en galère et de tomber entre les pattes d’un homme de pouvoir. Viel, ici, s’attaque frontaleme­nt aux questions de consenteme­nt et d’emprise, et décrit avec justesse cette petite ville en apparence proprette, où les hommes sont en fait liés par de vieux secrets et des jeux d’allégeance.

La Fille qu’on appelle de Tanguy Viel (Les Éditions de Minuit), 176 p., 16 €. En librairie le 2 septembre

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