LAUREL HELL

de Mitski Connaissez-vous la meilleure parolière de sa génération ? En ouvrant sa porte des enfers, la Nippo-Américaine remet son titre en jeu…

“Maman, suis-je encore jeune ?”, se demandait déjà Mitski à 22 ans. C’était il y a près de dix années, en conclusion de Class of 2013, premier moment décisif de l’une des discographies les plus nécessaires de l’époque. Car la suite de sa vingtaine, la musicienne nippo-américaine l’aura passée à consigner sans pudeur la misère et la violence du passage à l’âge adulte. Son sixième album poursuit cette quête identitaire mais en adoucit le chemin. En cela, Laurel Hell est a priori le disque le moins physiquement impératif de la New-Yorkaise. À 30 ans passés, Mitski ne chante plus avec cette urgence typique de la fin de l’adolescence, interprétant chaque phrase comme si c’était la dernière. Parolière virtuose, la meilleure de sa génération, elle continue d’écrire des chansons d’amour en trompe-l’oeil. Ce n’est jamais autant les relations entre humains qui l’intéressent que leur impact, souvent néfaste, sur la vie. Ouvrant sa porte aux enfers qui ont inspiré le titre du disque, Mitski semble enfin en mesure de faire la paix avec sa part d’ombre. Traversé d’un bout à l’autre par la folle ambition de transcender la très éculée synthpop eighties, Laurel Hell est rempli de mélodies retorses et d’arrangements grandioses, tantôt pour insuffler la vie à des mélodies futiles (The Only Heartbreaker), tantôt pour saboter scrupuleusement des moments de bravoure (There’s Nothing Left Here for You). Bizarre et réjouissant.

Laurel Hell (Dead Oceans/Modulor). Sortie le 4 février.