Les Inrockuptibles

TOUSSAINT DE MARS

- de Nelly Kaprièlian

Parfois, c’est en répondant à une commande qu’un·e écrivain·e se livre le plus. Jean-Philippe Toussaint se raconte ainsi à travers deux livres très différents, sur un même sujet : la pratique artistique. Le lieu où l’on se réfugie avec ses pensées, son geste, très importants pour l’auteur. Dans C’est vous l’écrivain, écrit pour une nouvelle collection lancée par Le Robert consacrée aux “coulisses de la création littéraire avec les plus grands auteurs” (dont Michel Bussi), il aborde longuement l’importance de son bureau, de son “lieu à soi” (comme disait Woolf). “Je l’ai déjà dit, je me demande si je ne préfère pas le processus de l’écriture au livre terminé. Un des piliers du plaisir de l’écriture est de pouvoir m’isoler dans un lieu clos.”

Et dans L’Instant précis où Monet entre dans l’atelier (Éditions de Minuit), très beau – et trop bref – texte littéraire qui accompagne un “arrangemen­t vidéo” d’Ange Leccia, (D’)Après Monet, à voir au musée de l’Orangerie, c’est au moment où Monet entre dans ce lieu clos qu’est l’atelier, au seuil du processus solitaire, que Toussaint a voulu saisir – figer pour toujours – le peintre. Cet instant entre vie et art, qui suspend l’artiste entre vie et mort. Cet instant où Monet ouvre la porte et revoit, à l’aube, ses Nymphéas en cours, qu’il reprend sans cesse, ne parvenant pas à sortir du processus, s’y enfermant. “Même s’il n’en a pas conscience, c’est bien à l’inachèveme­nt des

Nymphéas que Monet consacre les dernières années de sa vie.”

C’est vous l’écrivain (Le Robert/ “Secrets d’écriture”), 176 p., 14,90 € ; L’instant précis où Monet entre dans l’atelier (Éditions de Minuit), 32 p., 6,50 €, de Jean

Philippe Toussaint. En librairie le 3 mars.

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