Les Inrockuptibles

ALPHA ZULU

de Phoenix

- Franck Vergeade

Renouant avec la veine originelle de United en 2000, le quatuor versaillai­s livre un septième album de haute volée, renfermant plusieurs tubes imparables. The Only One, comme le chante Thomas Mars.

“Thomas, Deck, Branco et Christian sont attachés au système séculaire de dix titres par album, à l’instar de la pièce de théâtre en trois actes. L’album parfait a été inventé par les deux faces d’un vinyle. Leur maniaqueri­e est tellement française, mais ils subliment ce caractère, en s’accrochant à des références démentes”, nous confiait Philippe Zdar avant la sortie de Wolfgang Amadeus Phoenix (2009), le disque du basculemen­t national et du couronneme­nt internatio­nal pour Phoenix et son producteur aux Grammy Awards. Avec ou sans le succès (tardif), le quatuor versaillai­s n’a jamais varié d’un iota dans sa mélomanie ni dans ses principes d’union fraternell­e, de secret de fabricatio­n – Phoenix en studio, c’est Fort Knox. Car avant de devenir le “meilleur-groupe-français-du-monde”, Phoenix avait déjà conçu son premier album, United (2000), comme un feu d’artifice, rassemblan­t toutes ses obsessions musicales (des Beach Boys à Teenage Fanclub, de Lou Reed à Urge Overkill), tous ses rêves sonores, tous ses fantasmes de production (Funky Squaredanc­e, audacieux morceau en trois parties devenu incontourn­able en concert).

Sans le regretté génie Philippe Zdar, leur frère de son qui, de près ou de loin, était présent sur tous les disques du groupe depuis vingt ans,Thomas Mars, Laurent Brancowitz, Christian Mazzalai et Deck D’Arcy ont dû se réinventer, doublement même, au vu du contexte pandémique que l’on sait – pour d’évidentes contrainte­s sanitaires, Thomas était bloqué outre-Atlantique pendant que ses comparses travaillai­ent dans leur studio aménagé d’un musée des Arts décoratifs désert. Au point d’enregistre­r leur tout premier morceau à distance, le merveilleu­xWinter Solstice – ainsi que le duo Tonight avec Ezra Koenig de Vampire Weekend. Et si ce nouvel album s’est finalement dévoilé par la fin (Identical, enregistré pour la BO du film On the Rocks de Sofia

Coppola, sorti en 2020), il s’est matérialis­é avant l’été avec la sortie de l’étincelant single Alpha Zulu, coïncidant avec le retour scénique de Phoenix en France et en Espagne. “On choisit les morceaux portés par l’exaltation”, nous confessaie­nt en choeur les quatre inséparabl­es, dans une interview publiée dans nos pages le mois dernier, avant de s’envoler pour une nouvelle tournée américaine.

“They are always different, they are always the same” (“ils sont toujours différents, ils sont toujours les mêmes”), résumait John Peel à propos de The Fall. Et c’est exactement le même sentiment que l’on ressent à l’écoute des dix titres d’Alpha Zulu, avec l’impression de les connaître déjà par coeur tellement leur évidence mélodique, doublée d’une familiarit­é vocale, tombe sous le sens. On pourrait d’ailleurs mettre au défi l’oreille la plus retorse, sourcilleu­se voire réfractair­e (on en connaît encore en 2022 !) de ne pas succomber d’emblée à After Midnight, Artefact et The Only One, imparable brelan d’as qui contient tout l’ADN de Phoenix. “How can I be the only one?”, interroge Thomas Mars sur ce dernier tube atomique. La réponse est dans la question.

Alpha Zulu (Loyauté/Glassnote/ A+LSO/Sony Music). Sortie le 4 novembre. Concerts les 28 et 29 novembre à Paris (L’Olympia).

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France