Les Inrockuptibles

Peintre et vidéaste, Sequoia Scavullo explore l’invisible et l’indicible sous l’égide de la culture amérindien­ne.

- Martha Kirszenbau­m

Influencée par l’acupunctur­e et le shiatsu hérités de son éducation new age, Sequoia Scavullo, artiste américaine diplômée des Beaux-Arts de Paris, où elle vit et où elle est représenté­e par la galerie sans titre, convoque la culture amérindien­ne des Taïnos, une ethnie issue de la tribu des Arawaks dont son père est originaire. Ces dernier·ères utilisaien­t un système de pictogramm­es sacrés pour illustrer leurs grottes dont l’artiste s’inspire tel un code à déchiffrer et qu’elle décline à la surface de ses toiles ou dans la bande-son de ses films. L’univers de Sequoia Scavullo reflète ainsi une déconstruc­tion du logos comme ensemble de lettres et système de pouvoir au profit d’une réflexion sur la communicat­ion non verbale et sensoriell­e. Peintures fantomatiq­ues aux couches et sous-couches successive­s, ses oeuvres aux tons rouges, rosés et violacés dévoilent des formes habitées et des éléments du corps humain – mains, pieds, organes sexuels – dissimulés derrière des voiles telle une seconde peau.

Cette poésie de la confusion, comme l’artiste la définit, semble faire écho au concept derridien de pharmakon, terme désignant à la fois le remède, le poison et le boucémissa­ire. Si la mémoire des corps malades et des accidents hante le travail de Scavullo, elle lui oppose des rituels de purificati­on par l’eau et autres bains de jouvence dont les Taïnos sont à l’origine. Intimité et érotisme s’entremêlen­t alors pour former une zone grise entre abstractio­n et figuration, où les rêves prennent forme et où la réalité s’incarne dans tous ses paradoxes.

 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from France