LA FASHION WINK
Cowboys et danseuses : en janvier ont été dévoilées les collections masculines automne-hiver 2024-2025 et haute couture printemps-été 2024. Sélection.
TROUBLE DANS LE MYTHE AMÉRICAIN
Si, dans la mode contemporaine, le mythe du cowboy a longtemps fait écho à l’identité WASP véhiculée par Ralph Lauren, le musicien, producteur et directeur artistique Pharrell Williams rappelle les connotations plurielles de cette figure américaine à l’occasion de sa troisième collection homme pour la maison Louis Vuitton. Ici, les jeans sont surmontés de broderies florales en perles et paillettes et les manteaux de cuir se parent de clous : le cowboy joue sur les relectures queer et se mêle parfois au dandy en manteau de fourrure chaussé de Timberland émaillant la culture visuelle hip-hop des années 2000. Un trouble dans le mythe américain, dont le style opulent prend une résonance politique l’année de l’élection présidentielle américaine.
RETOUR À PORTERVILLE
À l’origine motif littéraire, le récit du retour trouve sa traduction textile dans la collection poétique et surréaliste de Rick Owens. Le créateur californien l’a baptisée du nom de sa ville natale, Porterville, pour s’opposer à l’intolérance du territoire dans lequel il a grandi.
Il y répond par la lumière en dessinant des silhouettes d’aliens échappant à toute classification : bottes plug, veste donut ou chauve-souris et combinaisons spatiales à seconde peau duveteuse questionnent les proportions mêmes du corps. Des ensembles aux allures d’armures dévoilent aussi la chair : la finesse se situe toujours dans l’ambivalence chez Owens, qui a choisi de dévoiler cette collection particulière loin des shows spectacles, dans l’intimité de son adresse du VIIe arrondissement de Paris.
READY-MADE IN TIKTOK
Cardigan en tricot épais fusionné à un large imperméable beige, chaussettes de tennis blanches collées à des souliers de skateur : chez Loewe, les pièces éclectiques s’hybrident les unes aux autres tel un ready-made vestimentaire illustrant la culture visuelle de TikTok, où les styles underground et pop d’époques différentes ne forment plus qu’un. Poursuivant sa réflexion sur le rapport au vêtement à l’heure du numérique, Jonathan Anderson s’inscrit dans la tradition artistique du collage, signalé par les tableaux de Richard Hawkins qui ornent le lieu du défilé et s’impriment sur des sweats ou d’impressionnants sacs fourre-tout. Fidèle à son étiquette de créateur conceptuel, Anderson l’applique dans des collections au savoir-faire de luxe.
HAUTE COUTURE, HAUTE CULTURE
Microtailleurs en tweed, jupe légère en mousseline de soie noire ou robe du soir dissimulant des plumes sous ses tissus vaporeux : ouverte par l’actrice et mannequin Margaret Qualley, la collection Chanel haute couture printemps-été 2024 célèbre le corps en mouvement en s’inspirant de l’univers de la danse, alors que la maison est le mécène du gala d’ouverture de la saison de danse de l’Opéra national de Paris depuis 2018. Pour accompagner ce mouvement libre au confluent des arts, la directrice artistique Virginie Viard a invité le réalisateur Dave Free à signer un court métrage poétique explorant la notion d’imperfection, Le Bouton, dont la BO est de Kendrick Lamar. Chez Chanel, la haute couture contemporaine se fait carrefour artistique.