La commune devra indemniser la famille de son cadre qui s’était pendu
La commune nouvelle des Achards a été condamnée jeudi 18 avril 2024 par le tribunal administratif de Nantes à indemniser la veuve et les deux fils de l’ancien directeur des services techniques de la commune de La MotheAchard, qui s’était suicidé sur son l
Directeur des services techniques de la commune, le cadre s’était en effet pendu dans les ateliers municipaux suite au « harcèlement » de la directrice générale des services ( DGS) : elle voulait le « remplacer par son amant » avait affirmé à l’audience l’avocat de la famille, Me Geoffroy de Baynast. Une plainte avec constitution de partie civile avait été déposée dans cette affaire en 2015 pour « harcèlement moral » et « homicide involontaire » , mais elle avait finalement été classée sans suite en raison des délais de prescription pénale. Les infractions semblaient pourtant bel et bien « constituées » aux yeux des enquêteurs.
dne C’est le Service régional de police judiciaire (SRPJ) d’Angers qui s’était vu confier l’enquête par le procureur de la République de La Rochelle : une première enquête confiée aux gendarmes locaux de La MotheAchard n’avait pas abouti en dépit du placement en garde à vue de DGS de la commune de l’époque.
Pas de prescription
Le SRPJ, lui, avait conclu que les infractions étaient « particulièrement susceptibles d’être imputées » à la DGS et « de manière un peu moins affirmée » au maire « sourd et aveugle » de l’époque.
Dans ce jugement en date du 18 avril 2024 qui vient d’être rendu public, le tribunal administratif de Nantes confirme dans un premier temps que la commune des Achards ne peut pas bénéficier de la prescription quadriennale pour échapper à sa responsabilité.
« Une plainte avec constitution de partie civile interrompt le cours de la prescription (...) dès lors qu’elle porte sur (...) l’existence (...) d’une créance sur une collectivité publique » , rappellent les juges. Or la veuve et le fils aîné du couple ont « déposé les 26 et 27 mars 2015 une plainte avec constitution de partie civile contre le maire de La Mothe-Achard Achard et autres pour homicide involontaire et harcèlement moral » , ajoutent
« Cette action, qui portait bien sur la créance invoquée par les requérants, (...) a été introduite avant l’expiration du délai de la prescription. »
Un « système de management directif »
Sur le fond, le tribunal administratif de Nantes estime qu’il n’y a pas de « harcèlement moral » de la DGS à proprement parler, mais que la responsabilité « sans faute » de la commune nouvelle des Achards peut malgré tout être engagée pour cet « accident de service » . « Les nombreux témoignages (...) permettent de constater que Monsieur a été placé dans un contexte de travail difficile à la suite de la nomination de cette dame en qualité de directrice générale des services » , soulignent les juges. « Cette dernière a adopté un système de management directif (...) se traduisant (...) par une remise en cause de la possibilité pour le cadre de contacter directement (...) les élus. »
« Il a pu manifester auprès du maire ou de certains élus son mal-être (...) sans toutefois formaliser les difficultés qu’il rencontrait et a présenté des troubles du sommeil à l’origine d’une grande fatigue » , poursuit le tribunal administratif de Nantes.
Mais « si les éléments évoqués par l’ancienne première adjointe au maire concernant les manoeuvres de la DGS pour déstabiliser la cadre pourraient (...) être pris en compte pour caractériser une situation de harcèlement, les exemples donnés ne sont pas assortis des précisions suffisantes » , jugent les magistrats. « Si toutes les personnes l’ayant côtoyé s’accordent sur sa grande conscience professionnelle et la qualité de son travail (...), ce dernier, d’un naturel réservé, s’exprimait peu sur ses difficultés. »
Préjudice d’affection
Le tribunal a en tout état de cause rejeté les arguments de la commune, qui suggérait que le suicide de son cadre ait pu être provoqué par des « difficultés relationnelles avec sa mère » , de « possibles répercussions de sa maladie auto-immune » ou encore son « échec au concours d’ingénieur territorial » . Elle devra donc verser 30 000 € à la veuve de son cadre et 25 000 € à chacun de ses deux fils pour leur « préjudice d’affection » . La municipalité a jusqu’au 18 juin 2024 pour contester ce jugement devant la Cour administrative d’appel de Nantes.