Matrimoine
La bonne affaire immobilière du député Urvoas visée par une plainte
C’est le terme avec lequel le groupe écologiste au Conseil de Paris souhaite, en plein débat sur l’écriture inclusive, rebaptiser les «Journées européennes du [matrimoine et du] patrimoine». «Le matrimoine est constitué de la mémoire des créatrices du passé et de la transmission de leurs oeuvres», a rappelé mercredi Joëlle Morel, élue EE-LV pour qui il s’agit, pour les femmes, de «se réapproprier l’héritage culturel qu’on [leur] vole». «Il serait temps que le Conseil de Paris s’occupe du boulevard des Capucins et Capucines, de la rue des Franches Bourgeoises», a ironisé le groupe UDI-Modem. Une association anticorruption du Finistère a déposé une plainte au parquet de Quimper contre l’ancien député et exgarde des Sceaux Jean-Jacques Urvoas, lui reprochant l’acquisition, en 2008, de sa permanence parlementaire avec des fonds publics. Comme l’a révélé Libé en juillet, le socialiste avait contracté, en 2008, deux emprunts bonifiés auprès de l’Assemblée (à 2 % d’intérêts l’année, supprimés en 2010 par le bureau du Palais Bourbon) pour un montant total de 203 206 euros. Ces emprunts, sur dix ans, auraient été remboursés avec ses indemnités représentatives de frais de mandat (IRFM), pour 1 950 euros les cinq premières années, puis 1 607,98 euros les cinq suivantes. En juillet 2017, Urvoas aurait offert à la location le bien (évalué en 2013 à 210 000 euros) pour un loyer mensuel de 1 650 euros, d’après la plainte déposée par l’association Cicero29. Ces pratiques, qui consistaient pour un parlementaire à acheter sa permanence avec son enveloppe forfaitaire pour frais de mandat (5 373 euros net mensuels pour les députés) et à en devenir donc propriétaires, ont été à plusieurs reprises épinglées. Une enquête publiée jeudi par le site France Info révèle que 32 anciens députés avaient financé l’achat de leur permanence, ainsi intégrée à leur patrimoine, avec leur IRFM, au moins partiellement. François Sauvadet (UDI), Geneviève Fioraso (PS), Alain Gest ou Guy Geoffroy (LR) reconnaissent notamment y avoir eu recours, certains ayant revendu leur permanence depuis, avec une plus-value à la clé. D’autres parlementaires n’ont pas répondu mais seraient également propriétaires grâce à leur IRFM. En 2015, l’association Pour une démocratie directe avait déjà dénoncé ces pratiques –légales mais discutables. Ce qui avait poussé l’Assemblée et le Sénat à lister les dépenses interdites avec l’IRFM, dont l’acquisition d’un bien immobilier, les contrats déjà signés continuant toutefois de courir en raison de la non-rétroactivité. La loi «pour la confiance dans la vie politique» votée cet été doit mettre fin, à compter du 1er janvier, à l’enveloppe forfaitaire pour frais de mandat. Lors de sa prochaine réunion, mercredi, le bureau de l’Assemblée devrait arrêter le détail des dépenses qui seront autorisées –et désormais remboursés sur justificatifs – et celles interdites, ainsi que les modalités de contrôle.
LAURE EQUY