Auteur, où es-tu ?
Avignon 2005. Ça gronde dans le petit monde du théâtre public. On s’invective, on s’écharpe et on rejoue la mort du théâtre. L’arme du crime: la consécration de la «performance», omniprésente lors de cette édition. Voilà Vilar assassiné, et le «verbe» noyé dans la merde et le sang. Pourtant, en 2018, le cadavre remue encore. Et il crache des mots, beaucoup même. Car si le triomphe du «postdramatique» (comme le théorisait Hans-Thies Lehmann) sur les scènes a remis en cause la centralité du texte, on constate depuis une dizaine d’années un retour en force de la narration. La parole prolifère sur les plateaux et les épopées de plus d’une dizaine d’heures ne sont pas rares. Dernier en date, le 2666 de Julien Gosselin, adapté du roman de Roberto Bolaño et joué à Avignon en 2016.
Seulement, si le texte est bien vivace, l’auteur dramatique contemporain, lui, semble un peu moribond. Pour s’en convaincre, il suffit de jeter un oeil aux grands succès du théâtre public de ces dernières années: réécritures de classiques à la manière du jeune globe-trottter Simon Stone «actualisant» Ibsen et Tchekhov, ou mise en scène de romans comme en proposent Vincent Macaigne (avec Dostoïevski), Julien Gosselin (avec Houellebecq et Bolaño) et prochainement Katie Mitchell (avec Duras, lire pages II-III) ou Thomas Ostermeier (avec Didier Eribon et Edouard Louis). En vogue, les
Entre engouement pour la performance, contexte économique et renouvellement esthétique, l’écriture dramatique traditionnelle semble avoir disparu du paysage. Laissant place, dans le théâtre public, aux reprises de classiques ou aux adaptations de romans et de films.