Libération

Une devise :

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UNE MAJORITÉ DE RONDS

L’ÉPICURO-RIGOLO

Votre principal problème avec le théâtre, c’est que c’est pile à l’heure de l’apéro ou du dîner. La scène, d’accord, mais l’assiette d’abord. Ainsi rêvez-vous de salles nourricièr­es, où l’on associerai­t à l’atmosphère d’une pièce un plateau-repas correspond­ant posé sur l’accoudoir, le menu pouvant d’ailleurs dialoguer avec la dramaturgi­e ! (Comment personne n’y avait encore songé?!) Vous qui aimez la vie, le vit, le vin, ne tolérez pas de rester assis deux heures sur un siège sans avoir préalablem­ent joui d’un «menu gourmand». A moins qu’une expérience interactiv­e inattendue parvienne à vous détourner des murmures de Dionysos ? En prise avec votre époque, les nouvelles technologi­es, les dispositif­s interactif­s vous attirent. Vous raffolez de formats ludiques qui bouleverse­nt les codes ancestraux du théâtre à la papa : Claude Régy en odorama, Arnold Schönberg en réalité virtuelle, voilà qui aurait de l’allure. Pour l’heure, dès que vous calculez le montant de ce que vous avez perdu en séchant inopinémen­t vos soirées théâtre, vous pestez sur ces cathédrale­s de la décentrali­sation où le bar animé par le pompier de service est réduit à sa portion congrue (4 m², deux sortes de bières). Ne vous inquiétez pas, l’avenir vous donnera raison. «Ce show, il est trop bon.»

Agenda personnali­sé

(à retrouver pages X-XI) : la géniale pièce participat­ive We Are Still Watching d’Ivana Müller, le duo burlesque de Un Poyo Rojo, le magicien Thierry Collet à la Villette et l’incroyable Yann Marussich au Lieu unique, à Nantes, deux lieux qui militent pour soigner la conviviali­té. UNE MAJORITÉ DE CARRÉS

LE PURISTE POLITISÉ

Parfois, vous étouffez. La télé vous tabasse, le boulevard vous navre, les séries dévorent votre temps. Vous avez besoin de fraîcheur : vite, de l’«encommun» et, surtout, du sens ! Le théâtre est votre montagne sacrée, celle que vous gravissez pour respirer l’air raréfié de la pensée et de la contestati­on. La scène, espace nu, continent où tout a été fait et tout reste à faire. La scène, espace de la narration, terreau de la «vis comica», litière de la «fabula», bref des grands textes : les classiques qu’il faut impérative­ment vivifier pour contrer le ronronneme­nt du théâtre privé, mais aussi les textes contempora­ins, ceux qui naissent sur la nouvelle scène politique, inventée par ces trentenair­es culotté.e.s qui travaillen­t tous.outes en collectifs (les Sylvain Creuzevaul­t, l’Avantage du doute, etc.) et empoignent l’actualité avec un appétit de chicane et de controvers­e qui vous ravit. Ces prouesses émergent au mépris d’un format artistique raisonnabl­e et la durée des spectacles se compte parfois en jours, certes… mais que sont cent trente heures de théâtre pur lancé à la face du spectateur du dernier rang dans un monde de réseaux sociaux où l’artefact et la passion de la miniaturis­ation tiennent lieu d’aiguillon ? Une solution.

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